Après la grosse victoire 8-0 face au CA Paris en 8e de finale de Coupe de France, nous avons longuement échangé avec Giorgia Spinelli, la capitaine et touche italienne du Stade de Reims, qui assure les arrières de son équipe et bien plus encore. 

 

Coeurs de Foot - 8-0 c'est un score qui reflète bien la physionomie du match selon toi et ce que vous attendiez de ce match [une démonstration de force] ?

Oui c'est un peu le résultat qu'on attendait. Nous ne négligeons aucun adversaire, car on sait que sur la Coupe [de France] tout est possible. On était conscients tout de même de notre position [de favori], on était motivés à aller chercher ce quart de finale, parce que pour nous c'est notre première fois [à ce stade de la compétition], donc on le voulait fortement et on a réussi. On est très contentes [d'être en quart de finale]. 


CDF - Comme la coach [Amandine Miquel] l'a dit, c'est un moment historique pour le club [qui accède à son premier 1/4 de finale de Coupe de France] ?
Oui on rentre - encore plus - dans l'histoire du club, donc ça nous fait vraiment plaisir. Maintenant on attend le tirage demain (le lundi 3 février), mais on sait que sur un match de Coupe, pendant les 90 minutes, tout est possible, donc on verra bien [sur qui on tombera].


CDF - En plus, le CA Paris était aussi parti sur l'optique de créer l'exploit face à vous, donc il fallait être d'autant plus vigilant ?
Oui c'est ça. Maintenant il ne va rester quasiment que des équipe de D1 (seul Arras, club de D2, s'est qualifié en quart), donc on va se rencontrer entre équipe du championnat élite, mais ça reste différent les deux compétitions.


CDF - De qui t'inspires-tu dans ton jeu pour jouer de cette façon ?
Quand j'étais en Italie, avant d'arriver en France, Wendie Renard c'était quand même ma référence, donc ça me fait bizarre de me retrouver capitaine face à elle sur nos matches, comme il y a une semaine (défaite 5-0 au Groupama Stadium), mais c'est tout de même une fierté. Ça a toujours été mon modèle, dû aussi à son gabarit, son jeu de tête, je trouve aussi qu'elle est sereine et calme, comme mon style de jeu. Je me suis toujours inspirée d'elle, maintenant j'ai aussi eu le plaisir de la connaître de près, donc c'est vraiment super.
En ce qui concerne le football masculin, je suis fan de Javier Zanetti, ça reste quand même un exemple, pour ce qu'il a fait aussi en dehors du terrain, ça reste exemplaire, et j'ai eu la chance aussi de pouvoir le connaître quand je jouais à l'Inter en Italie, c'était énorme.


CDF - Et justement tu es aussi très présente en dehors du terrain, sur ta page personnelle pour communiquer avec les supporters, c'est important de savoir gérer cet aspect aussi pour une joueuse ? 
C'est bien je trouve de publier des posts, de "faire vivre son image" à travers ses réseaux sociaux, afin de partager ce qui est important pour nous, de notre quotidien, avec les gens, des bêtises qu'on fait aussi quelque fois (rires), faire des photos avec les enfants, nos supporters... Donc j'essaye de publier un maximum de photos, des moments de partage en équipe, mais même en dehors, autour de notre vie personnelle, parce que je trouve cela intéressant à partager. 


CDF - C'est quelque chose d'important, tu as compris que ça aide aussi à populariser le foot féminin et à rendre attractif et attachant, les joueuses et le Stade de Reims ?
Je pense que ça doit passer par là [la popularisation du foot féminin]. C'est à nous de faire les efforts aussi pour démocratiser la pratique. On a vu aujourd'hui par exemple, que c'était cool d'avoir autant de public, même si c'était contre nous, ça fait quand même plaisir. Nous on n'a pas un public comme ça en championnat la plupart du temps, donc c'est dommage, il faut progresser sur cet aspect et attirer plus de supporters. C'était vraiment super de les entendre chanter pendant 90 minutes, et encourager leur équipe.


CDF - Qu'est-ce que tu fais à côté du football personnellement ? 
En France j'ai la chance, c'est un privilège de pouvoir faire que du foot, et c'est à temps plein, je m'entraîne beaucoup. Alors qu'en Italie je travaillais à côté parce que ce n'était pas possible de faire que du foot, maintenant ça a évolué la situation là-bas également, donc ça sera plus facile à gérer pour les joueuses, qui évoluent en Italie aussi.
Ici pour le moment l'année dernière j'étais éducatrice aussi (le Stade de Reims était en D2), mais cette année j'ai abandonné ce poste, parce qu'avec la D1 ça devient un peu compliqué, avec les entraînements, les matches etc. (Après avoir échangé avec le coach adjoint, Amaury Messuwe, Giorgia Spinelli nous a confié qu'elle a un diplôme de comptabilité en Italie, et est l'intendante du Stade de Reims pour l'équipe féminine, mais ça lui était sortie de la tête. Elle est en charge des déplacements, de la logistique de l'équipe féminine, dossier d’organisation, validation fiche équipements etc).

 
CDF - Et as-tu déjà réfléchi à ce que tu aimerais faire après ta carrière de footballeuse ?

Je pense rester dans le domaine du sport. Après je ne sais pas encore si ça sera en tant que coach ou dirigeant.
Maintenant (sourire) je me focalise encore sur ma carrière, j'ai encore quelques années à vivre sur le terrain j'espère, et du coup je vais profiter un maximum et on verra bien la suite. Mais c'est vrai qu'il faut tout de même penser à l'avenir.


CDF - Ma dernière question, concerne la sélection italienne. C'est une équipe qui progresse très rapidement, notamment depuis l'Euro 2017 [c'était la première équipe Championne du Monde et a rafler tous les titres au début de l'émancipation des femmes dans le football, dans les années 70), avec plusieurs clubs qui ont lancé leur équipe féminine, comme la Juventus ou encore l'AS Roma, l'AC Milan etc ?
Oui moi personnellement j'ai joué à l'Inter Milan, donc j'ai pu vivre la situation là-bas il y a trois ans, et c'est complètement différent maintenant, parce que je discute souvent avec mes potes et ils m'ont dit qu'il y a eu quand même un changement total. A la suite de la Coupe du Monde 2019 aussi, les clubs sont devenus plus professionnels aussi, donc c'est bien, il y a de plus en plus de clubs masculins, qui lancent leur équipe féminine, comme la Juve, l'AS Roma, la Fiorentina etc donc c'est super de voir cela. Aujourd'hui (dimanche 2 février, ndlr), il y avait le derby AC Milan vs Inter de Milan, c'est un match palpitant à voir !
Après c'est vrai qu'au sujet de l'équipe d'Italie, depuis l'Euro 2017, il y a eu une vraie montée en puissance. Moi j'ai eu la possibilité de faire des rassemblements avec la coach actuelle, Milena Bertolini et c'est vrai qu'elle a donné quelque chose en plus au sein de l'équipe. C'est une coach qui travaille vraiment bien avec l'équipe nationale, et elle connaissait pas mal de joueuses, puisqu'elle avait entraîné Brescia, donc c'était un plus avant de prendre la tête de la sélection. Personnellement quand on a fiat la préparation pour la Coupe du Monde en France, la première semaine, on était attendu pour faire un parcours extraordinaire, et c'est ce qu'elles ont réussi à faire, pousser par la ferveur du pays. De notre côté (celles qui n'ont pas été retenues pour disputer le mondial, ndlr), on a fait les Universiades et c'est une compétition qui restera gravé à jamais dans mon esprit, puisque c'était ma première fois en tant que capitaine de la sélection d'Italie, c'était vraiment une fierté.


CDF - Tu aspires tout de même à retourner en sélection aujourd'hui ?
Bien sûr, c'est quand même un rêve et ça le sera toujours de porter le maillot de son pays. Donc je vais travailler très dur avec le club et j'espère un jour être rappelée, en tout cas je ne vais pas retenir mes efforts pour y parvenir.
 

Dounia MESLI