C’est la surprise de cette troisième liste de Corinne Diacre, après une convocation en équipe de France B le mois dernier, Nadjma Ali Nadjim fait ses débuts dans la cour des grandes. Arrivée à Bordeaux cet été, en provenance de Grenoble (D2), l’attaquante reconnait que sa jeune carrière prend un nouveau tournant. Avant les matches amicaux face à l’Allemagne et la Suède, Coeurs de foot a rencontré la néo-bleue afin qu’elle nous livre ses premières impressions.

 

Coeurs de foot – Tout d’abord Nadjma, tu arrives à 14 ans à l’Olympique Lyonnais, comment s’est passée ton arrivée là-bas ?

 

Nadjma Ali Nadjim – Bien et pas bien. Je venais de quitter les garçons et je ne voulais pas trop jouer avec les filles. J’étais même sur le point d’arrêter le foot. Heureusement mon frère m’a motivé. J’avais dû mal [avec les filles] car ça changeait, c’était plus le même impact, c’était plus la même vitesse. Puis, j’avais commencé avec les garçons et toujours joué avec eux. 

Mais après c’était bien à Lyon puisque à l’époque il y avait le niveau D3 et il y avait que des filles plus âgées que moi, et c’est ce qu’il me faut pour me booster. En plus, il n’y avait qu’une seule fille née en 1994 qui pouvait jouer par match, et on était quatre 94 à se battre pour tenir cette place le week-end, donc ça me motivait, il y avait du challenge. 

 

« Quand j’ai la confiance il y a tout qui va avec. » 

 

CDF – Après Lyon, tu es partie à Claix [qui deviendra Grenoble] en D2 féminine. Tu y continues ta progression, mais l’an dernier tu dois faire face à une blessure…

Oui, en début de saison j’ai eu un petit syndrome de « l’essuie-glace » (tendinite du genou) qui me poursuivait depuis quelque temps. J’ai préféré calmer pour mieux revenir.

 

CDF – Pour le coup tu es vraiment mieux revenue. A partir de janvier tu exploses et marques 14 buts en 8 matches. Tu as sentie que cette coupure t’avais fait du bien ?

Oui dès mon retour je me suis sentie super bien. Avec les filles de l’équipe ça se passait très bien, et d’un point de vue personnel je suis revenue plus grande. Cette blessure m’a aidé à travailler sur mon mental. Et il y a aussi le fait que le coach m’a un peu plus fait confiance en deuxième partie de saison. Quand j’ai la confiance il y a tout qui va avec. 

 

« C’est à moi de faire bon usage de cette carte. »

 

CDF – Maintenant on va parler un de l’équipe de France, que tu découvres en ce moment même ?

Oui puisque je n’ai jamais connu de sélections jeunes. J’ai commencé le mois dernier en étant appelée en équipe de France B. Et là maintenant en A. 

 

CDF – Ça a été vite pour toi alors. Tu t’y attendais un peu ?

Pas vraiment. Pas tout de suite en fait (sourire aux lèvres et les yeux qui pétillent).

 

CDF – Qu’est-ce que qui a payé selon toi ? Qu’est-ce que la sélectionneuse, Corinne Diacre a vu en toi ?

Je ne sais pas ce qu’elle a vu en moi, mais je sais qu’elle est très ouverte, elle donne sa chance à tout le monde dans cette équipe. Du coup elle s’est dit pourquoi pas me tester, après c’est à moi de faire bon usage de cette carte. C’est entre mes mains maintenant. Quand on est en équipe de France le but c’est d’y rester, ce n’est pas de passer. J’aurais été appelé la prochaine fois, mon état d’esprit aurais été le même. Le truc c’est qu’une fois qu’on est appelé, il faut se battre pour y rester. Être appelé en équipe de France, ce n’est que le début de l’histoire. 

 

CDF – Cette convocation récompense aussi le travail collectif de ton club, les Girondines de Bordeaux ?

Oui vraiment, je les en remercie. Depuis que je suis arrivée à Bordeaux [cet été] il y a tout qui s’enchaîne. Heureusement que les filles sont là. C’est vraiment un travail collectif, parce que si mes coéquipières ne se donnaient pas comme elles se donnent je n’aurai pas pu être comme je suis en ce moment. 

 

CDF – Bordeaux a fait un gros recrutement de talents lors de cette trêve estivale..

C’est vrai qu’il y a Juliane (Gathrat), Erin (Nayler), Niamh Fahey aussi. Elle c’est vraiment la force tranquille, l’expérience, elle fait du bien en défense centrale. Et il y a Carol (Rogrigues) qui pèse sur les défenses adverses, elle fait du bien.

 

CDF – Justement ta coéquipière brésilienne vient de se blesses et souffre d’une rupture des ligaments croisés du genou droit. Elle va être indisponible plusieurs mois, ça doit être un moment difficile pour l’équipe ?

Oui c’est un coup dur, on perd une personne importante. Pour l’instant on a joué que Montpellier sans elle, mais les repères vont revenir petit à petit. Puis ce qui est bien c’est que derrière ça suit. On a perdu Carol mais l’attaquante qui la remplace [Sarah Cambot] elle est de taille. Après les entraînements restent les mêmes, c’est juste la compo du week-end qui change. 

 

« Pour être meilleure il faut jouer contre les meilleures. »

 

CDF – Justement Monpellier, ou encore le PSG que vous jouerez après la trêve internationale, ce sont des matches que tu avais coché plus particulièrement en venant jouer en D1 ?

Bien sûr. J’aurai pu rester dans mon confort en D2, car j’étais aussi sollicitée par des clubs de D2. J’aurais pu rester aussi sur Grenoble où j’étais super bien. Mais j’aime beaucoup le challenge et quand je regardais ces équipes à la télé, je me disais « pourquoi pas moi ? ». Ce sont des équipes où ça joue vraiment bien et contre qui j’ai envie de me confronter. 

 

CDF – On remarque que tu as vraiment un état d’esprit de gagnante. D’où tu tiens ça ?

Pour être meilleure il faut jouer contre les meilleures. Puis je n’aime pas perdre. C’est mon plus gros défaut, que ce soit à l’entraînement, en match ou même un petit jeu ludique, il ne faut pas que je perdre. Mais d’un côté c’est aussi ça qui fait que je me surpasse à chaque fois. 

 

CDF – Pour une compétitrice comme toi, perdre que 2-0 contre Lyon, ce qui est leur plus petite victoire de la saison, c’est une petite satisfaction ou même pas ?

C’est quand nulle parce que c’est une défaite (sourire). Après on se dit que c’est pas si mal car personne ne l’a encore fait sur cette saison. Même en Ligue des Champions on voit que des équipes prennent cinq ou sept buts. Et ce sont des équipes qui jouent la Ligue des Champions. Alors que nous, Bordeaux, on arrive à les tenir que deux buts à zéro, c’est encourageant.

 

CDF – Sur le terrain tu es quelqu’un qui aime bien foncer et déborder sur ton côté gauche, c’est quelque chose qui te caractérise ?

C’est ma marque de fabrique on va dire. Je suis droitière mais cette année en effet je joue beaucoup à gauche. 

 

CDF – Une passe c’est comme un but pour toi ?

Oui. Avant non. Là j’ai pas encore marqué c’est pour ça que je dis ça (rires). Mais contre le Paris FC, quand je fais la passe décisive pour Solène (Barbance) j’ai cru que c’était moi qui avais marqué, j’étais trop contente, et du coup je me suis dit « ah c’est pareil, c’est la même sensation, c’est juste qu’il n’y aura pas marqué mon prénom ». 

 

« Je ne fais pas de manière sur le terrain (…)
si je joue, c’est ça le plus important. »

 

 

CDF – Pour revenir aux Bleues, tu as fait tes premiers entraînements avec l’équipe de france. Comment ça se passe ?

Ça va, petit à petit je me mets dans le bain. C’est différent de Bordeaux mais ça ne change pas vraiment, ça reste la même intensité. 

 

CDF – Est-ce qu’il y a des joueuses que tu connais déjà bien, ou des joueuses qui te connaissent ?

Oui il y a des joueuses contre qui j’ai joué quand j’étais à Lyon en U19. Après plus jeune j’ai joué avec Aminata Diallo et Amel Majri. Et, il y a des plus grandes comme Sarah (Bouhaddi) ou Wendie (Renard), qui m’ont déjà vu quand j’étais plus petite. Mais elles doivent me trouver changée, je me suis calmée depuis. J’ai pris sur moi. 

 

CDF – Ah, parce que tu avais un tempérament de feu étant petite ?

Bah comme je l’ai dit tout à l’heure : j’aime pas perdre ! 

 

CDF – Parmi les matches prévues, vous vous déplacez en Allemagne puis vous jouerez la Suède à Bordeaux. Est-ce que si tu devais vivre ta première sélection sur ce match ce serait un sentiment encore plus fort du fait que c’est à Bordeaux ?

Non, pas spécialement. Je suis quelqu’un qui aime jouer avant tout. Je ne fais pas de manière sur le terrain, j’ai commencé sur la terre, le gore et que ce soit à Bordeaux, Marseille, Lyon ou autres, tant que joue, si je joue, c’est ça le plus important. 

 

CDF – On a vu que sur les réseaux sociaux le compte des girondins de Bordeaux t’a félicité. Ça doit faire plaisir, d’autant plus que tu es la première représentante de la section féminine appelée en équipe de France ?

Oui ça m’a fait très plaisir (avec un grand sourire). Parce qu’il y a deux comptes, celui des féminines et celui des hommes, et je ne m’attendais pas à ça. J’étais agréablement surprise.

 

. La rédaction