A l'issue de la rencontre glanée 4-0 avec la manière face au Ghana, la sélectionneure de l'équipe de France U20 a réagi aux questions des journalistes. Les Bleuettes décollent mercredi 3 août pour le Costa Rica, en vue de disputer le mondial U20 avec comme objectif - non sans humilité - de ramener le trophée en France !

 

Journaliste - Une rencontre contre un pays africain, c'est aussi l'occasion de se préparer pour le premier match j'imagine [face au Nigeria]. Attendiez-vous plus d'impact physique tout de même ou d'adversité ?

Pas forcément plus d'impact physique, parce qu'on a récupéré les joueuses le 27 [juillet], donc on est le 29, c'est tout de même plus que court (sourire) si je peux m'exprimer ainsi. Ce sont des joueuses que nous avons maintenu "avec nous" durant le mois, entre la Sud Ladies Cup (22-28 juin) et le rassemblement [d'aujourd'hui] où on les a appelé toutes les semaines, toutes, chacun notre tour avec le staff technique. On leur a envoyé des vidéos pour les maintenir aussi dans l'objectif, elles sont en phase de préparation, je tenais à ce qu'elles puissent reprendre avec leur club également. Parce que j'étais entraîneur en club, donc je n'oublie pas d'où je viens, et c'est aussi une période charnière pour les joueuses et les jeunes joueuses entre autre, pour déjà montrer à l’entraîneur qu'elles peuvent jouer en D1 ou en D2 etc donc ça m'importait vraiment beaucoup. 

On savait qu'on allait être un peu courtes, on savait que ça allait être peut-être une équipe désorganisée, comme c'est souvent le cas dans le football africain jeune, mais c'est un continent qui progresse beaucoup, on l'a vu sur la dernière CAN senior [au Maroc], c'est un continent qui travaille de mieux en mieux, avec des joueuses de qualité. Il y avait peut-être un niveau hétérogène de l'équipe adverse, mais il y avait des bonnes joueuses tout de même, Badu, Boaduwaa, Salamatu Abdulai, Owusu etc., qui nous ont un peu malmené,

 

Journaliste - Qu'allez-vous retenir de cette rencontre et de cette victoire ?

Ça nous a permis de tester des systèmes différents, parce que moi j'aime bien un peu brouiller les pistes, j'aime bien que les filles puissent s'adapter à plusieurs systèmes dans le même match, en fonction de nos qualités aussi. On a commencé par un 4-3-3, puis le 3-5-2, qui se termine en 3-4-3, ensuite je fais sortir même une autre joueuse, qui était rentrée, pour terminer à 10, parce que c'est une joueuse qui est venue, mais qui n'est pas forcément prête, donc il fallait aussi lui faire comprendre qu'un match international reste un match international et qu'il faut se préparer sérieusement pour ça, mais c'est aussi lui dire que je compte sur elle. Je sais que c'est une joueuse qui fera la différence en Coupe du Monde, et je le sais, mais du coup on va devoir travailler un petit peu plus avec elle.

 

Journaliste - Vous aviez trois joueuses en infirmerie aussi et qui n'étaient pas là aujourd'hui, dans quel état physique sont-elles ?

Pas d'inquiétudes particulières, parce que Marie [Petiteau] il n'y avait rien, elle était juste positive covid, là elle était négative ce matin, donc elle aurait même pu jouer. Après Magnaba Folquet, c'était à la suite de la fin de match lors de la Sud Ladies Cup contre le Mexique, elle a repris collectivement mais depuis très peu de temps en club, donc pas de risque non plus. Et Cyrielle Blanc a ressenti une douleur à l'ischio lors de l'évaluation vameval, donc on n'a pas pris de risque non plus. L'objectif aujourd'hui c'était vraiment de se préparer, d'être prêtes pour le 11 août.

 

Journaliste - Les satisfactions seraient la bonne entame, d'avoir pu faire tourner, au-delà des systèmes ?

Complètement ! C'était en effet un sous-objectif du match, c'était d'être plus efficaces [devant le but], donc de donner la confiance aux attaquantes, parce qu'on en manqué lors de la Sud Ladies Cup quand même. Donc là même si l'adversité n'était pas tout à fait la même en effet, mais marquer un but, c'est quand même ce qui manque à l'échelon national sur nos sélections jeunes et moins jeunes, donc c'est quelque chose sur laquelle on travaille. Tout comme l'aspect mental, vraiment beaucoup avec certaines d'entre elles, et je suis contente, parce que Esther Mbakem a marqué, elle était un peu dans le doute. On a fait un travail d'accompagnement avec elle, qui est valorisé aujourd'hui. Puis même le tir au but, c'est quelque chose qu'on travaille depuis très longtemps. On en fait tout le temps à la fin de chaque entrainement, et voilà il a été magnifiquement tiré par Laurina [Fazer]

 

"Le haut niveau si on n'a pas de discipline et de rigueur,

on ne peut pas [aller loin]"

 

Coeurs de Foot - On a vu une équipe de France U20 disciplinée aujourd'hui, même en défense, elles ont répondu présentes. Est-ce que c'est de bon augure justement pour cette Coupe du Monde, qui s'annonce très relevée, d'année en année le niveau se rehausse à chaque fois ?

Oui oui complètement, d'autant plus relevé que notre groupe est relevé et que le plausible adversaire par la suite sera aussi difficile forcément. Oui [elles ont été] disciplinées, parce que le haut niveau si on n'a pas de discipline et de rigueur, on ne peut pas [aller loin]. Les filles le savent, on travaille de cette façon là, quand on est à l'entraînement, quand on est en match, c'est de la rigueur, c'est de la discipline, on ne perd pas de temps sur le terrain, c'est pour ça qu'on va entamer nos matches assez fort, assez vite, pour faire mal à l'adversaire, surtout sur des nations comme celle-ci. 

Ensuite c'est vrai qu'on va encore travailler défensivement, parce qu'il y a des ajustements entre autres elles, dans les alignements, la couverture mutuelle, mais on a des joueuses vraiment de talent à ces postes défensifs et des joueuses polyvalentes également. Ça a aussi été un des choix pour ces 21 joueuses, c'est d'avoir des joueuses qui puissent s'adapter à différents postes et qui nous permettent comme dans un match comme celui-ci de pouvoir évoluer à plusieurs postes [dans le courant du match].

 

"Que collectivement on monte

encore d'un cran."

 

Journaliste - Quelle va être la suite du programme, avant le départ mercredi prochain ?

On va essayer de s'adapter un maximum, comme on ne peut que partir le 3 août, donc c'est huit jours avant notre premier match, c'est un petit peu tard, mais c'est comme ça, donc on va essayer déjà de gagner du temps sur le décalage horaire en décalant nos horaires de repas, d'entraînements etc On va un petit peu vivre Clairefontaine by night (rires) si je peux m'exprimer comme ça.

On va travailler encore, on a fait un test vameval, pour qu'elles puissent travailler individuellement au niveau athlétique, parce qu'on a des joueuses avec un niveau vraiment hétérogène. Le compte à rebours est lancé, c'est court, mais on va faire le maximum pour faire en sorte qu'elles soient au niveau le plus homogène, et puis que collectivement on monte encore d'un cran. On aura un match sur place contre un club local le 6 août, qui nous permettra après de finaliser un peu les associations de joueuses.

 

Journaliste - Avez-vous des craintes au niveau des conditions climatiques, sur le taux d'humidité par exemple ?

Oui c'est vrai que c'est un pays humide. On va essayer de s'adapter au plus vite, ce n'est pas là où on est le plus à l'aise [comme climat], sauf peut-être les Bretonnes (rires), mais ce n'est pas la même humidité, mais je n'en ai pas en plus [de Bretonnes] (rires), à part Jade Nassi (née à Vannes). J'ai beaucoup de Franciliennes... 

L'humidité, l'altitude surtout, car San José c'est quand même à 1200 mètres également, mais c'est surtout le décalage horaire qu'il va falloir gérer le plus vite possible, parce que c'est tout de même 8h de décalage. Quand il sera minuit, il est 8h du matin en France, donc on peut vraiment être très éveillées en pleine nuit, donc on va gérer, entre autres avec certainement le fait d'éviter qu'elles aient leur portable sur les premiers jours, qu'elles puissent récupérer un maximum. Puis nous ici anticiper le décalage horaire.

 

Journaliste - Sur l'état d'esprit au sein de l'équipe de France 

C'est un groupe [de joueuses] que je n'ai pas eu souvent, en tout cas dans sa totalité, parce qu'il a fallu jongler avec l'équipe de France U19, mais c'est un groupe qui se connait depuis longtemps aussi. Il y a beaucoup de joueuses issues du même club, du Paris Saint-Germain, j'en ai une douzaine, ensuite j'ai aussi Célina Ould Hocine et Anaëlle Tchakounte qui sont Paris FC, Vichi [Becho] et Alice Sombath qui sont [originaires de la région parisienne]. La mayonnaise elle prend bien, parce que je pense qu'elles se respectent, et que le cadre est assez clair, assez juste, elles savent qu'il y un décor qui est définit, mais après à l'intérieur, elles sont assez libres, assez autonomes. Moi je fonctionne plutôt comme ça sur la confiance et la responsabilisation. Tant qu'elles me le rendent comme ça sur le terrain, ça me va.

 

Coeurs de Foot - Justement vous avez dominé en première période avec deux buts d'avance, vous auriez pu vous laisser piéger en seconde période, mais vos joueuses sont restées sérieuses, solidaires jusqu'au bout ?

Sérieuses, solidaires, sereines je dirais, parce qu'on est assez tranquille aussi dans l'encadrement. On sait où on veut aller, on ne se prend pas pour d'autres attention, on sait que ça va être un parcours difficile, mais si on veut être championnes du monde, on sait que toute façon ça sera un long chemin. 

Nous on essaye justement de leur transmettre ça, la sérénité, puis surtout de la confiance, parce que ce sont des joueuses qui ont de la qualité. Si elles sont là, c'est qu'elles l'ont, maintenant c'est juste qu'elles doivent exprimer pleinement leurs aptitudes, et c'est sur que certaines avec les 2002, qui ont peu de temps de jeu en club, on les récupère, elles manquent de confiance, elles manquent de repères de jeu. Je vais parler de Jade Le Guilly, mais on voit que dans l'alignement etc, mais parce que c'est une joueuse qui joue très très peu [avec le PSG], donc c'est normal, il faut juste accepter cela, un temps [d'adaptation] et qu'on la prépare du mieux possible, qu'on lui donne tous les outils pour qu'elle puisse être à son niveau optimal le jour-J.

 

"Il faut aussi avoir les épaules pour ça"

 

Journaliste - En tant que compétitrice, l'objectif c'est d'atteindre ce dernier carré ?

Oui mais nous on parle aussi de victoire [de titre]. Après je sais qu'on parle souvent de ça, mais je l'ai dit à la Sud Ladies Cup, on n'a pas peur de l'ambition, ce n'est pas malsain d'en avoir. Il faut aussi avoir les épaules pour ça, on fait, la Fédération fait des efforts pour nos jeunes joueuses, pour leur formation. On met en place actuellement [des choses], on essaye de restructurer un petit peu aussi au niveau de la FFF, de la DTN, sur des futurs centres de formation pour les féminines etc donc il y a des moyens qui sont attribués, on a des joueuses de qualité. Je pense qu'on a des joueuses aussi, qui peuvent être imprévisibles, on a des joueuses qui sont capables de jouer en possession, en transition, c'est à dire sur des contre-attaques. Donc je pense qu'on a vraiment de la qualité, assez homogène sur ce groupe, serein, tranquille.

 

Journaliste - Ressentez-vous une excitation particulière, car première compétition depuis longtemps [depuis 2018] ou une impatience ?

Oui [de l'excitation], oui je dirais une impatience aussi, ça c'est vrai. Après une pression particulière ? Non. On essaye de travailler là-dessus avec elles, sur la pression positive, que sur le terrain, du moment qu'on donne tout, et qu'on prenne aussi du plaisir, car c'est ça aussi le haut niveau, c'est prendre du plaisir, ça créé des émotions, des émotions positives et le groupe il se vit aussi dans des émotions positives, il se fait aussi dans la victoire. C'est pour ça aussi qu'aujourd'hui il fallait qu'on gagne pour avoir des émotions positives, ensemble, collectives et puis à partir de là on a nos repères qui se créent.

 

Journaliste - Sur la présentation du groupe C de la France (Nigeria, Corée du Sud et Canada)

Ce sont des adversaires complètement différents [les uns des autres], ce n'est pas si simple [a gérer], c'est pour ça qu'on joue dans des systèmes différents, des styles différents. Le Nigeria c'est une équipe qui va être très athlétiques, c'est la meilleure nation U20 du continent africain avec des joueuses de talent, trois attaquantes très fortes, un milieu de qualité et une capitaine assez emblématique je trouve, avec beaucoup de charisme, donc on sait que ça ne sera pas facile. Elles sont toujours présentes dans les compétitions jeunes, il n'y a pas de hasard. Les Canadiennes qui ne sont pas faciles à jouer, des mots de la coach américaine [Tracey Kevins lors de la Sud Ladies Cup], c'est une nation athlétique, qui est en place, donc il va falloir qu'on joue vite, qu'on met de l'intensité dans nos transmissions, et qu'on rivalise aussi athlétiquement. Enfin la Corée, on n'a pas trop d'informations, mais c'est une équipe asiatique, ça bouge, ça court. Donc ça va être trois matches assez relevés, d'un point de vue athlétique, d'un point de vue de répétitions des efforts, puis au niveau du jeu, peut-être au niveau des différents systèmes également.

 

 

Photo : Dounia Mesli

Dounia MESLI