Plébiscitée en équipe de France A pour la dernière liste, mais appelée en U23 pour ces deux rencontres amicales contre l'Italie et le Portugal, Inès Benyahia prend les choses comme elles viennent, sans se mettre trop la pression. La joueuse du Havre, prêtée par l'OL, espère un jour tout gagner en club et en sélection. Sa réaction en zone mixte, après la victoire 1-0 face au Portugal, grâce à son ballon dévié pour Noémie Mouchon.
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Coeurs de Foot - Ce match était très compliqué, mais un peu comme tous les matches en U23 [avec le peu de temps de préparation] ?
Oui c'est vrai qu'on a du mal à être efficace devant les buts, mais je pense que dans le jeu on propose un bon projet. Je pense qu'on est toutes ensemble et on travaille bien collectivement. Maintenant il est certain qu'il faut être réaliste devant les buts, car c'est l'objectif d'un match, c'est ce qu'il nous manque pour pouvoir gagner les matches, tout en restant solide derrière.
On a eu un peu de chance sur le but, mais je pense que c'est le résultat de ce qu'on a produit tout au long de la rencontre.
CDF - Il y a aussi eu les changements, qui vous ont fait du bien, [avec surtout l'entrée de Noémie Mouchon, qui amène le but, sur ta passe on peut dire, ou ton ballon dévié] ?
(rires) Oui bien sûr, (sourire) après ça ce sont les choix des coachs (elle regarde Frédéric Biancalani présent sur le côté lors de l'interview avec les joueuses), ce n'est pas moi qui décide, je suis sur le terrain (sourire), je joue, mais oui c'est un bon choix.
CDF - Face à l'Italie vous avez bien maitrisé votre adversaire, avec une grosse victoire 4-2, une belle victoire, et là vous confirmez, donc c'est super positif ce dernier rassemblement ?
Oui on maitrise souvent l'adversaire, le football français est un football de possession, donc je pense qu'on le prouve bien sur le terrain. Offensivement il faut trouver les solutions pour pouvoir être efficaces.
"Ça serait mieux si on avait plus de rassemblements
et plus de matches entre nous"
CDF - On a senti sur le terrain de la frustration parfois, notamment de ta part, car vous aviez vraiment envie de trouver la faille, mais le fait de ne pas avoir beaucoup de temps de préparation entre vous, explique aussi la difficulté pour régler tous les automatismes et les détails ?
Oui il y a de la frustration, car on n'a pas l'habitude de jouer ensemble, on n'a pas beaucoup de rassemblement au cours de la saison, on en a 5/6 et je pense que pour être collectivement meilleur, il faut être plus ensemble.
On le voit en club, c'est plus facile de trouver les automatismes. Maintenant on essaye au maximum de se trouver. On se connait depuis un moment, donc ça fonctionne, mais ça serait mieux si on avait plus de rassemblements et plus de matches entre nous, plus de compétitions.
"Je pense que je n'ai pas particulièrement
de pression"
CDF - Il y a eu avant la liste des U23, la liste de l'équipe de France A, ce même jour (jeudi 28 mars, ndlr), tu avais été très plébiscitée par les fans, nous également on s'attendait à ce que tu sois appelée. Est-ce que justement cette attente des supporters entre autres, t'as mis la pression, car sur le dernier match avant la liste contre Reims justement, on a senti que ça pouvait être une source de "distraction" avec l'attente qu'il peut y avoir autour ? Est-ce que les listes mettent la pression et font déjouer les joueuses ?
(elle réfléchit brièvement) Non je pense que je n'ai pas particulièrement de pression, la sélection c'est la sélection [U23 ou A]. Le match contre Reims était assez compliqué, oui on l'a perdu 2-0... Collectivement et individuellement j'avais un petit peu plus de mal, mais je pense que [la liste] ça ne m'a pas du tout perturbé par rapport à cela. Maintenant je me remets en question et j'essaye de faire au maximum. L'équipe de France A arrivera un jour ou l'autre j'espère. Je fais le travail en U23 et en club, et on verra la suite. Je prends du plaisir sur le terrain, je joue comme je sais jouer.
CDF - Quelle a été ton adaptation au HAC, en arrivant de l'OL ?
Mon adaptation au début c'était très compliquée, car les infrastructures et même mes coéquipières, c'est différent. Quand on joue avec les meilleures joueuses du monde, c'est différent de venir dans une équipe, qui joue le maintien et qui essaye de jouer les playoffs.
Mentalement je pense que j'ai passé un cap, car on devient plus mature, on devient leader de l'équipe, quand tu joues avec des grandes joueuses [à Lyon] et que tu essayes de faire passer des messages à l'équipe [au HAC]. Je pense que ça c'est bien fait.
Au début j'avais un peu plus de mal, mais aujourd'hui je m'intègre super bien, avec les filles on s'entend super bien, et on le voit sur le terrain, même si les résultats ne sont pas forcément ce qu'on attend, mais c'est bien collectivement [dans l'ensemble].
CDF - Est-ce difficile justement de s’adapter à un nouveau style de jeu ?
Je pense que j'ai un style de jeu qui s'adapte à tous les styles, je suis polyvalente, je peux jouer 6/8/10, et surtout mon style c'est de jouer collectivement, donc je pense que c'est assez facile pour moi, donc sincèrement ça ne m'a posé beaucoup de problèmes.
CDF - Quel est le rôle de ta famille dans ta carrière ? Est-ce qu'ils sont très présents pour toi ?
Oui je pense que pour tout athlète de haut niveau, sa famille c'est important, car quand on change de clubs, quand on a des ambitions élevées, on est obligé d'avoir du soutien à côté. Si la famille n'est pas là pour nous remettre dans le bon chemin [on peut vite perdre pied]. Pour prendre un exemple, la confrontation de Reims, j'ai fait un mauvais match, mes parents étaient là pour me le dire, pour me remettre en question, car en tant que joueuse on ne se voit pas, on ne peut pas forcément prendre le recul sur nos performances, donc je pense que c'est important [d'avoir leur regard]. Ma famille sera toujours derrière moi, toujours là à me soutenir.
CDF - Qui ont été tes modèles ?
J'ai des modèles surtout dans le foot masculin, à l'image de Lionel Messi, qui joue collectivement, comme lorsqu'il était au FC Barcelone. J'adore l'ancien Barca, avec Xavi, Iniesta et co, on le voit sur le terrain, j'essaye toujours de faire des une-deux. J'aime beaucoup le style de jeu de Kevin De Bruyne aussi, car c'est un peu mon style également [de prédilection], donc j'aime beaucoup ces athlètes.
CDF - Quels sont tes objectifs à court, moyen et long terme ?
À court terme bien finir la saison avec le HAC. Pour la saison suivante, je verrais ce qui se passe, quand je retournerais à Lyon, et c'est aussi mon objectif d'aller en équipe de France A, c'est dans ma tête.
CDF - Quand tu vois les équipes qui ont gagné les dernières compétitions en sélection, est-ce que tu vois un lien entre elles ? De notre côté, on a surtout l'impression qu'elles ont joué comme une seule seule femme. La France ambitionne de gagner son premier trophée cet été, donc c'est ça la clé ?
Oui j'ai suivi l'Espagne surtout [lors du mondial 2023]. La France ambitionne de tout gagner.
J'ai vu l'Espagne comment elles ont joué, collectivement c'est au-dessus. Quand on a vu la finale de Ligue des Nations Espagne-France [de février], on a vite vu que les filles se connaissaient par coeur, elles savaient très bien ce qu'elles faisaient.
[Pour gagner des titres] il faut se connaitre, il faut avoir les automatismes, et jouer au tiki-taka comme j'aime (rires nerveux), c'était plus facile [ainsi pour elles de maitriser et gagner leurs matches, les Espagnoles].
CDF - Elles ont joué comme une seule seule joueuse, unies les unes aux autres, vers un même objectif, comme vous avez su le faire à la fin sur ce match justement ?
Oui, le foot c'est un sport collectif, donc si on est toutes unies, on va toutes réussir.
Je pense que c'est ce qui nous manque peut-être [en équipe de France A], mais je sais que ça va arriver. Je pense qu'ils vont faire quelque chose cet été j'espère, en tout cas je serais derrière l'équipe de France [que je sois prise ou pas].
CDF - Penses-tu que l’identité de jeu d'une équipe est primordiale pour gagner ?
Oui il faut avoir une identité de jeu, un collectif qui est soudé, collectivement il faut être fort, il faut avoir un projet de jeu aussi c'est très important, un fond de jeu, et après ça déroulera tout seul.
CDF - Est-ce que tu analyses personnellement tes adversaires ou tu laisses cela justement au coach ?
En sélection c'est un peu plus compliqué, car on n'a pas assez de temps, mais en club, j'ai souvent [analysé mes adversaires]. Je tire souvent les penaltys, les coups francs, je sais que j'analyse beaucoup la gardienne, comment elle se déplace, on m'envoie des vidéos (nouveau regard de Frédéric Biancalani et rires entre les deux, nerveux pour Benyahia), et après on fait aussi des retours individuels et collectifs, ils nous montrent comment l'équipe va jouer, donc on analyse beaucoup l'adversaire.
Photo : Tim GUIGON / FFF