Le football féminin espagnol a désormais sa convention collective. Un texte qui permet à la discipline de faire un grand pas vers le professionnalisme, et de rejoindre, à sa manière, la FA WSL anglaise. Le texte signé mardi a eu droit aux honneurs du parlement espagnol, avec une cérémonie organisé ce mercredi à Madrid.

 

C'est l'aboutissement de longues négociations qui se sont étalées sur près d'un an et demi entre les clubs et les représentants des joueuses de première division espagnole. Un accord désormais signé et qui garantit un statut professionnel à toutes celles qui évoluent en Primera Iberdrola. Cette convention collective, a été qualifiée de « première pierre » par Ainhoa Tirapu, gardienne de l'Athletic Bilbao et partie prenante des négociations.

 

Le football féminin au parlement espagnol

Pour « célébrer » cet accord, une cérémonie a eu lieu ce mercredi dans l'enceinte du Palais des Cortès, lieu où se réunissent les députés espagnols. C'est la présidente du Congrès des députés en personne, Meritxell Batet, qui a officié durant cette cérémonie organisée au Parlement pour entériner la signature de cet accord. Elle n'a d'ailleurs pas manqué de citer Megan Rapinoe dans son discours...

Les joueuses étaient présentes en nombre pour cette occasion, parmi elles, on peut citer Priscila Borja (Betis Séville), Jade Boho (EDF Logrono) ou encore Silvia Meseguer et Olga Garcia (Atlético de Madrid), aux côtés d'Ainhoa Tirapu qui a pris la parole durant cette cérémonie.

Du côté de David Aganzo, président de l'AFE (Association des Footballeurs Espagnols), le texte à des allures de « convention pionnière », qui pourrait donner des idées à travers l'Europe. En effet, elle garantit désormais un salaire minimum de 16.000 euros par an pour les joueuses à temps plein, et de 12.000 euros an pour les joueuses à trois-quarts temps (75 % d'un temps plein), qui constitue désormais le seuil plancher pour signer un contrat dans un club de première division en Espagne (contre un mi-temps auparavant).

Une mesure qui va entraîner des augmentations mécaniques de salaires pour les joueuses avec les plus bas revenus, notamment celles qui étaient employées à mi-temps jusqu'à présent, ou encore les joueuses qui touchaient moins de 16.000 euros.

 

Des professionnelles du football

Cette convention apporte une série de garanties financières aux joueuses, en terme de rémunération, mais aussi de droit à l'image, à partir du moment où elles ont disputé au moins 10 matches dans une saison, ou été convoquées à 12 reprises en match officiel. Elle précise également certaines règles concernant le temps de travail, le temps de repos (un jour et demi par semaine), les vacances (30 jours par an)... La convention s'applique par ailleurs de manière rétroactive, c'est-à-dire depuis le début de la saison en cours.

Le texte est censé également apporté des garanties pour des joueuses qui connaîtrait une ou plusieurs périodes de grossesse pendant leur carrière, avec des prolongations mécaniques de contrat pour les joueuses qui attendraient un enfant alors qu'elles évoluent dans le championnat espagnol.

Autant de pas en avant qui ont été validés au terme d'un chemin tortueux, notamment ces dernières semaines alors qu'un pré-accord avait été signé entre les différentes parties le 15 décembre dernier. Parmi les points encore à régler, la question des droits TV, et notamment la volonté de certains clubs de conserver leurs droits à l'image à côté d'un accord global de cession des droits de diffusion.

 

Des négociations serrées en coulisse

Un aspect qui peut sembler accessoire, mais qui a visiblement participé à bloquer la partie financière du dossier, rendant inapplicable la convention pré-signée par les représentants des joueuses (AFE, Futbolistas ON) et l'ACFF (Association de Clubs de Football Féminin), qui regroupe notamment 13 des 16 clubs de Primera Iberdrola (à l'exception de l'Athletic Bilbao, le FC Barcelone et le CD Tacon).

La solution trouvée a été proposée par le groupe Mediapro (qui diffuse une partie des matches du championnat), en ajoutant une enveloppe d'1,1 million d'euros, en plus des 2,4 millions d'euros versés au titre de l'accord signé au printemps 2019 sur les droits TV. 1,1 million qui seraient répartis entre 11 clubs de manière à assurer financièrement l'application de l'accord.

Restent cinq clubs qui ont fait des choix différents concernant les droits de diffusion : le FC Séville qui a négocié de manière séparée avec Mediapro, et les quatre clubs hors de l'accord de diffusion : l'Athletic Bilbao, le FC Barcelone, le Madrid CFF et le CD Tacon (qui deviendra officiellement la section féminine du Real Madrid à partir de la saison prochaine).

Une résolution qui exclut de fait la fédération espagnole (RFEF), qui est pourtant chargée de l'organisation du championnat (depuis cette saison), mais finalement restée en marge de cet accord. Ruben Alcaine, président de l'ACFF a d'ailleurs « oublié » de mentionner la fédération dans ses remerciements lors de la cérémonie au Palais des Cortès, signe que certains désaccords persistent en dépit de la signature de cette convention.

 

Photo: Mediapro / Twitter

Hichem Djemai