Le nom de Vera Pauw fait déjà partie de l’histoire du football féminin néerlandais. Ancienne internationale dans les années 1980 et 1990, elle avait pris les rênes de l’équipe nationale entre 2004 et 2010.

Son mandat est notamment marqué par une première qualification pour un Euro en 2009. Les Pays-Bas atteindront les demi-finales et des joueuses comme Sherida Spitse et Shanice van de Sanden, championnes d’Europe par la suite en 2017, étaient déjà présentes dans cette sélection.

Vera Pauw a également été associée au lancement de l’Eredivisie Vrouwen en 2007, le championnat féminin néerlandais ou encore à la promotion des pratiques mixtes dans le football. Beaucoup d’observateurs lui reconnaissent une influence décisive dans la progression des Pays-Bas sur la scène internationale, concrétisée lors du dernier Euro, mais aussi avec une finale de coupe du Monde en 2019, sous la houlette de Sarina Wiegman.

 

Un passé remonté à la surface

Pourtant, son histoire est marquée par une partie plus sombre. Une enquête, réalisée par le journal néerlandais NRC, révèle que Vera Pauw aurait été violée et victime d’agressions sexuelles à plusieurs reprises, principalement dans les années 1980, alors qu’elle était joueuse de l’équipe nationale néerlandaise.

Ces agressions auraient été commises par un entraîneur employé par la fédération néerlandaise de football (KNVB). Il s’agit d’un homme plus âgé. Vera Pauw a alors 23 ans, et l’homme en question compte quatorze années de plus. Son nom n’a pas été révélé, mais interrogé par les journalistes de NRC, il a reconnu une relation avec Vera Pauw, tout en niant tout « problème » ou « comportement (…) inapproprié ».

Les faits se seraient produits à deux reprises en octobre 1986, au domicile de Vera Pauw, un « viol » que l’actuelle sélectionneuse de l’Irlande refuse d’admettre dans un premier temps, avec un sentiment de « honte », et de « culpabilité » d’avoir « laissé » cet homme l’agresser sexuellement.

Dans un texte publié vendredi sur les réseaux sociaux, Vera Pauw regrette notamment que les « souvenirs » associés à ces violences, restées dans le domaine privé pendant 35 ans, aient « pris le contrôle » sur sa vie.

Vera Pauw évoque d’autres faits ultérieurs d'agressions sexuelles, impliquant le même homme, ainsi que d’autres entraîneurs affiliés à la KNVB, et qui seraient produits dans les années 1990 puis dans les années 2000 au moment où Vera Pauw était sélectionneuse des Pays-Bas. Aujourd’hui en poste en Irlande, elle est également mariée avec Bert van Lingen, ancien sélectionneur de l’équipe féminine des Pays-Bas (deux mandats entre 1979 et 1991).

 

Marginalisée par sa fédération

L’enquête menée par les journalistes de NRC révèle également le manque de considération de la part de la fédération néerlandaise envers Vera Pauw, son travail et le football féminin de manière plus générale. Ce manque de reconnaissance, l’indifférence affichée ou encore la volonté de la présenter comme une personne avec qui il est difficile de travailler, seraient le pendant de ces agressions et comportements sexistes dont aurait été victime Vera Pauw.

La fédération néerlandaise a été avertie à plusieurs reprises par Vera Pauw, et une enquête indépendante avait été initiée l’an dernier pour éclairer la manière dont la KNVB s’était comportée vis-à-vis de Vera Pauw, aussi bien concernant les agressions qu’elle avait pu subir qu’au sujet de la reconnaissance de son travail.

Perçue comme une pionnière dans le football européen, Vera Pauw a également été sélectionneuse de l’Écosse, de la Russie ou de l’Afrique du Sud, avec qui elle a participé aux Jeux Olympiques de Rio en 2016. Depuis 2019, elle officie désormais à la tête de l’équipe d’Irlande. Suite à ces révélations, la fédération irlandaise a publié un communiqué exprimant « son soutien plein et entier » à Vera Pauw, aussi bien sur le plan « personnel » que « professionnel ».

De son côté, la KNVB a d’ores et déjà reconnu des « erreurs » et un « manque de réactivité », indiquant également vouloir engager une forme de « médiation » avec son ancienne internationale et sélectionneuse.

 

Photo : Stephen McCarthy/Sportsfile

Hichem Djemai