A l'occasion de la dernière journée de D2, nous avons rencontré les championnes de cette saison 2015-2016, les joueuses de l'Olympique de Marseille. Promues en D1 avec Metz et Bordeaux, elles ont terminé la saison avec un succès 7-0 contre Nivolas-Vermelle.

 

Une victoire avant la D1

Dimanche, on disputait la dernière journée du championnat de D2. Dans le groupe C, l'Olympique de Marseille jouait son dernier match face à Nivolas-Vermelle. Une rencontre pour le plaisir, et pour finir en beauté devant leur public au stade Lebert.

C'était d'ailleurs particulièrement la fête pour l'une des joueuses, Tess Laplacette, l'une des « jeunes pousses » marseillaises et qui fêtait sur le terrain ses 17 ans. Dans les tribunes, on retrouve les fidèles supporters qui ont garni les travées en nombre, même si ils sont quelques uns à espérer être plus nombreux pour fêter les filles et leur accession en D1.

La faute peut-être à un autre match, la veille au Stade de France où les garçons de l'OM ont perdu la finale de la Coupe de France face au PSG. Quelque supporters avaient promis de faire le déplacement à Lebert mais le moral a du manquer au réveil...

Ils pourront toujours se rattraper la saison prochaine pour voir les filles dans des matches qui ressembleront de plus en plus à des affiches de Ligue 1 avec les montées de Bordeaux et Metz, deux clubs qui comme l'OM seront présents dans l'élite aussi bien chez les femmes que chez les hommes.

Sur le terrain, les Marseillaises ont assumé leur statut de meilleure équipe de la saison en D2. Face à Nivolas, l'OM n'a mis que neuf minutes à ouvrir le score par Pauline Cousin. Un but inscrit « dans un fauteuil » après un festival de Caroline Pizzala sur le côté droit avant de finalement servir en retrait Pauline Cousin pour l'ouverture du score marseillaise(9e).

 

Les Olympiennes généreuses avec leur public

Des buts, il y en aura sept dans cette rencontre, tous au crédit de l'Olympique de Marseille avec un avantage de 4-0 acquis à la mi-temps. Parmi les buteuses, la capitaine Caroline Pizzala inscrira un triplé, avec un penalty (40e), un magnifique coup-franc aux 16 mètres (49e), et un centre qui se transforme en but à la 70e minute.

Caroline Pizzala sortira ensuite du terrain sous des applaudissements nourris du public marseillais remplacée par Cindy Caputo et laissant son brassard à Nora Coton-Pelagie. La numéro 7 marseillaise qui elle aussi ira de son but dans cette rencontre à la 78e minute profitant d'une erreur dans la défense de Nivolas, avant de faire montre de toute sa dextérité devant le but.

Les deux autres buts de l'OM ont été inscrits par Cécilia Vignal en première période. La numéro 9 de l'OM très active sur le début de match en attaque et récompensée par deux buts (18e et 31e). Le premier but vient conclure un bon mouvement collectif côté droit, avec une inspiration de Caroline Pizzala qui laisse passer pour Tess Laplacette. La numéro 5 centre et Vignal vient couper au premier poteau.

Comme un symbole, Cécilia Vignal finit une saison pleine par ces deux buts qui viennent récompenser l'une des rares joueuses de l'OM à avoir vécu l'aventure marseillaise depuis le début. Présente depuis le niveau district, elle a su se faire une place dans l'effectif et gagner ses galons de titulaire à tous les échelons grimpés par l'OM depuis cinq ans.

Entrée en jeu en seconde période, Sarah Koutbi est une autre des olympiennes de la première heure. Moins souvent en jeu que sa coéquipière, elle reste une de ces joueuses qui ont su s'accrocher dans le sillage des féminines de l'OM et de sa quête de haut niveau.

 

Pour gagner, faites confiance aux jeunes !

A l'issue de cette saison, Marseille termine meilleure équipe de D2 réussissant à terminer le championnat en restant invaincu. Une performance réalisée dans un groupe C relevé, face à des équipes comme Dijon, Toulouse ou Grenoble-Claix. Si Marseille ne domine pas les statistiques, elle peut s'appuyer sur un collectif qui a fait ses preuves avec un mélange d'expérience et de très jeunes joueuses.

C'est d'ailleurs un des éléments les plus atypiques de cette équipe de l'OM où c'est la défense qui est le secteur de jeu le plus jeune de l'équipe. Dimanche, contre Nivolas, Christophe Parra avait aligné Amandine Blanc (20 ans), Anaïs M'Bassidje (22), Maelle Lakrar (16) et Tess Laplacette (17).

On pourrait aussi mentionner Léonie Multari (19½) , régulièrement titularisée dans l'axe de la défense marseillaise ou encore la gardienne Anaïs Hatchi (21) qui n'a pas perdu un match en D2 en deux saisons. Une jeunesse de la ligne arrière marseillaise qui n'a pas empêché les Olympiennes de finir meilleure défense de la saison (à égalité avec Bordeaux et Metz).

Une défense qui fait « la fierté » de Christophe Parra, et qui correspond à la philosophie du coach marseillais et de sa volonté de « faire travailler tout le monde ensemble » sans hésiter à donner des responsabilités aux plus jeunes sans que leur inexpérience ne soit une barrière infranchissable pour celles qui méritent d'avoir leur chance sur le terrain.

Mais de l'expérience il y en a dans cette équipe. Si Sandrine Brétigny, meilleure buteuse de l'OM cette saison, n'était pas sur la pelouse aujourd'hui, les cadres de l'équipe étaient bien présentes sur le terrain pour cette dernière journée. A commencer par Caroline Pizzala et Nora Coton-Pélagie, les deux milieux de terrain de l'OM qui apparaissent comme le « centre nerveux » de l'équipe, assurant le tempo, distribuant les relances et orientant les actions offensives.

Des joueuses qui parlent beaucoup pendant les rencontres, donnant des indications à leurs coéquipières pour s'assurer que l'équipe reste en place. Si le coach reste présent au bord du terrain, on sent que ces deux joueuses jouent un rôle déterminant sur le terrain qui dépasse leurs qualités techniques respectives.

Deux joueuses qui ont connu le haut niveau et notamment au PSG et qui font partie de ces recrues qui ont aussi permis d'élever Marseille jusqu'à cette accession en D1. Caroline Pizzala est arrivée la saison dernière avec cette envie de participer à l'aventure marseillaise et de mener le club de sa ville jusqu'au plus haut niveau. D'autres comme Nora Coton-Pelagie, Sandrine Brétigny ou Barbara Bouchet sont arrivées cette saison avec cette même volonté du staff olympien d'associer de jeunes joueuses surclassées en équipe première et des joueuses plus expérimentées et capable de mener cette équipe vers le haut niveau.

 

Un si long chemin...

Cette accession en D1 vient couronner une ascension rapide de l'OM vers le haut niveau. Au printemps 2011, ce projet prend forme autour d'une équipe de trois personnes composée de Christophe Parra et deux anciennes joueuses de l'OM Valérie Mannoni et Josiane Marcassoli. Une association formée par l'ancien directeur sportif du club, José Anigo, et qui lancera l'équipe marseillaise via l'organisation d'une « détection » avec « 300 filles ».

Une sélection qui permettra de lancer la première mouture de l'OM féminines. Cinq ans après, l'équipe dirigeante et le staff se sont étoffés mais l'on retrouve Valérie Mannoni et Josiane Marcassoli qui sont présentes autour de l'équipe. Valérie Mannoni, dirigeante de l'OM mais qui reste une bénévole, prenant sur son temps libre pour accompagner l'équipe, jouant un rôle de « deuxième maman », et de relais entre le coach et les filles de l'équipe.

Elle se souvient d'ailleurs des débuts de l'OM et des terrains sans électricité ni eau et où elles assuraient les entraînements au côté de Christophe Parra. Une situation qui a depuis évolué mais Valérie Mannoni s'attache encore aujourd'hui à rappeler aux joueuses la modestie des débuts et de faire attention à ne pas trop « s'embourgeoiser » avec le succès que connaît désormais le club.

Parmi les joueuses qui ont connu cette époque, Anaïs M'Bassidje, 22 ans et qui fait partie des « anciennes » de cette équipe. Avant d'être une olympienne, et de réaliser un « rêve de petite fille », elle joue à Endoume, un autre club de la ville. En 2012, Anaïs rejoint l'OM alors que le club évolue en quatrième division.

Une époque et des débuts à Endoume dont elle garde un surnom « Adé » pour Adébayor. Plus imposante que la majorité des joueuses, Anaïs M'Bassidje évoluait au poste d'avant-centre ce qui lui vaut ce surnom en référence à l'attaquant togolais.Sur les bords des terrains, les supporters ont gardé ce surnom d'Adé que l'on peut entendre lorsque la joueuse de l'OM est à son avantage sur le terrain. Anaïs évolue désormais au poste de latérale gauche, voire parfois dans l'axe lorsqu'il y a besoin de remplacer une de ses coéquipières.

En arrivant en D1, elle attend déjà avec impatience les matches contre l'OL où elle espère croiser deux joueuses qu'elle apprécie tout particulièrement, Elodie Thomis et Griedge Mbock, avec la promesse de belles oppositions dans le couloir gauche marseillais.

 

Répondre aux attentes c'est aussi se faire plaisir

Avec la D1 qui se profile, l'exigence de s'adapter au haut niveau se fait plus pressante pour l'OM. En premier lieu parce que les trois équipes qui sont montées la saison dernière sont immédiatement redescendues. Un scénario que ne veut pas vivre le club et les joueuses. Dans cette optique, le rôle de la capitaine Caroline Pizzala dépasse le cadre du terrain.

Comme elle nous l'a rappelé dimanche, elle s'attache tout particulièrement à apporter une « rigueur », une « exigence » et préparer les plus jeunes joueuses à « un niveau qui n'a rien à voir » en D1. Une adaptation qui pour Caroline Pizzala «va être difficile », d'abord par l'élévation du niveau mais aussi parce qu'être à l'OM c'est jouer pour une équipe où « les objectifs sont bien plus importants » mais aussi qui « est attendue à chaque match ».

Cette double exigence du club et du haut niveau, Christophe Parra en est également pleinement conscient. Ces attentes font selon lui parti du jeu avec comme règle que « depuis le niveau district, toutes les équipes (...) veulent battre l'Olympique de Marseille ». Il nous parle de cet « écusson qui fait parler, qui fait vibrer » et qui fait que paradoxalement « tout est plus compliqué » pour les joueuses de l'OM parce que les moyens dont disposent le club vont avec cet impératif de se montrer à la hauteur de l'institution que représente le club.

Toutes ces attentes ne sont pourtant pas le seul élément du discours du coach qui insiste beaucoup dans son rapport aux joueuses sur cette idée « d'aventure humaine ».Des mots que l'ont retrouve chez Anaïs M'Bassidje et qui sont l'une des caractéristiques de cette trajectoire ascendante des Olympiennes.

Au cœur de cette aventure, l'idée que le respect d'un cadre commun, des règles sont les préalables aux résultats mais surtout à la possibilité de « prendre du plaisir » en étant sur le terrain. Pour Christophe Parra le résultat ne peut être qu'un aboutissement, une conséquence et non une fin en soi. L'objectif est de réfléchir à des stratégies, des manières d'évoluer sur le terrain qui permettent de progresser et d'atteindre ses objectifs sportifs tout en gardant à l'esprit cette notion de plaisir partagé collectivement.

 

La quête du haut niveau

Si l'OM a désormais atteint la première division, l'objectif du club est très clairement d'aller vers une structure plus professionnalisée et qui à terme rivalise avec les meilleurs clubs de D1, un cercle très fermé et qu'il ne sera pas aisé de rejoindre dans l'immédiat. Pour la saison prochaine, cette évolution passera probablement par du recrutement, avec des joueuses capables d'apporter cette expérience du haut niveau et de faire progresser encore l'équipe.

Et dans cette optique, difficile de ne pas penser aux quatre accessions et de ses joueuses qui ont accompagné l'OM dans cette ascension et qui ne seront pas de la partie la saison prochaine. Certaines d'entre elles, anciennes joueuses comme Alicia Pourquies, étaient d'ailleurs présentes dimanche au stade Lebert pour fêter l'accession en D1 de Marseille.  Une magie qui est peut-être à ce prix-là, un haut niveau qui est à la fois un rêve mais qui nous confronte aux exigences et aux sacrifices qu'il implique et donc la difficulté d'en faire partie.

Pour des joueuses comme Anaïs M'Bassidje, Cécilia Vignal et les plus jeunes comme Cindy Caputo, le rêve continue. Pour d'autres comme Caroline Pizzala, c'est aussi la fierté d'avoir amené son club au plus haut niveau, et de porter la responsabilité de l'avenir du club et de son équipe féminine. En grand, forcément...

 

Photo en une: Patrick Nosetto

Hichem Djemai