La milieu de terrain défensive du FC Fleury 91 et de l'équipe de France a répondu samedi en conférence de presse aux questions des journalistes. En tant que remplaçante qui va peut-être disputer le match contre le Nigeria lundi, la joueuse de 26 ans a évoqué la très bonne ambiance qui règne au sein du groupe France. Elle a aussi évoqué l'engouement extra-ordinaire autour de cette Coupe du monde 2019 en France et l'éventuel quart de finale face à l'impressionnante équipe des Etats-Unis.

 

Journaliste (L'équipe) : Bonjour Maéva, je voulais savoir comment se passe cette Coupe du monde pour vous ? Vous n'avez pas encore eu l'occasion de jouer. Comment se passent ces premiers jours ?

Et bien écoutez, ces premiers jours se passent très bien, d'un point de vue personnel et pour tout le groupe ! Effectivement, je n'ai pas encore joué mais les émotions qu'on vit, et les résultats qu'on a jusqu'à maintenant, font que tout se passe très bien ! Je me sens très bien dans le groupe France et je suis ravie de participer à cette compétition.

 

Journaliste (RMC Sport) : La France est déjà qualifiée pour les 1/8e de finale avant de jouer son 3e match de poules face au Nigeria le 17 juin (21h). Comment abordez-vous ce 3e match ? Est-ce que la sélectionneuse va faire souffler quelques joueuses pour, par exemple, vous donner du temps de jeu ?


Déjà je suis ravie d'être qualifiée pour les 1/8e de finale. Comment aborder le match contre le Nigeria ?  Je pense, avec autant de sérieux qu'on l'a fait jusqu'à maintenant. Pour ce qui est de mon temps de jeu, je ne suis pas à la place de la sélectionneuse (sourire). Elle fera ce qu'elle aura à faire et nous, le groupe, nous sommes là, nous sommes prêtes à répondre à tous les choix possibles de la coach, pour aller le plus loin possible.

 

Journaliste (France TV) : J'ai vu beaucoup de choses à propos de vous, de très belles choses ! Je trouve que vous êtes quelqu'un d'intelligent, vous avez un métier en parallèle (Maéva Clémaron a passé son diplôme d'architecte, ndlr). Je voudrais donc savoir ce qu'une Coupe du monde de football peut avoir comme impact sur votre vie professionnelle ?

Disons que la Coupe du monde, c'est un peu une récompense pour moi. Je suis ravie, comme toute les joueuses, de participer à cet événement. Après, par rapport à l'architecture et au football, je pense que l'un a toujours alimenté l'autre. Et aujourd'hui, pouvoir participer à la Coupe du monde, en étant architecte, c'est une autre "casquette" qui est mise en valeur. J'en suis ravie ! De plus ça met en avant le domaine de l'architecture. C'est tant mieux !

 

Journaliste (Ouest France) : Pour rebondir sur la première question qui a été posée, vous n'avez pas encore eu de temps de jeu. Est-ce que, du banc des remplaçantes, vous avez vu cette ambiance incroyable qu'on a vue au Parc des Princes de Paris et à l'Allianz Riviera de Nice ? Comment l'avez-vous ressentie ?

C'était énorme ! Ultra intense ! Je n'avais jamais vécu ces émotions-là jusqu'à maintenant. Et du banc, ce que je peux dire, c'est que c'était très prenant ! Et j'ai eu l'impression de "jouer sur la pelouse", du moins mentalement. On était à fond derrière nos coéquipières. Nous sur le banc, on est à 200% derrière nos coéquipières. Et avec l'engouement, le public, le bruit, tout résonne dans le stade et c'est quelque chose d'énorme ! Et on le vit à 200%, au moins aussi intensément que les coéquipières qui sont sur le terrain.

 

« La vie de groupe est une des clés pour aller loin dans cette compétition »

 

Journaliste (La Nouvelle République) :  On sent une ambiance vraiment très sympa au sein de cette équipe de France. Elise Bussaglia vient de dire juste avant vous que vous parliez beaucoup. Qu'est-ce que vous en dîtes ? L'ambiance, le quotidien au sein de cette équipe de France, c'est comment ?

Alors je ne savais pas qu'Elise avait dit ça sur moi (rires), mais c'est vrai ! Le quotidien ? Le groupe vit très bien, il y a une bonne ambiance. Il faut que ça dure et j'ai confiance en mes coéquipières pour que ça dure. Et je pense que la vie de groupe est une des clés pour aller loin dans cette compétition.

Moi dans la vie en général j'essaie de prendre soin de ceux que j'apprécie. Et en sélection c'est le cas avec toutes mes coéquipières. Je suis à leur écoute, je donne mon avis parfois, même des conseils, j'en reçois aussi. Et je chambre parfois (rires). Je pense que c'est ce que Elise a voulu dire tout à l'heure !

 

Journaliste (L'équipe) : Maéva, traditionnellement en équipe de France il y a souvent eu des Bretonnes, comme par exemple aujourd'hui Eugénie Le Sommer ou Griedge MBock. Je voulais savoir justement si elles revendiquaient souvent le fait d'être Bretonnes et comment elles vivent le fait de jouer le match contre le Nigeria le 17 juin à Rennes, devant leur public ? Est-ce qu'elles vous en parlent ?

Ecoutez, je ne suis pas dans leur tête (sourire). A titre personnel, elles ne m'en parlent pas spécialement. Mais on sait que c'est une région qui leur tient à coeur. On le sait, on le sent ! C'est top pour elles. Après elles ne nous en parlent pas tout le temps non plus mais on en a déjà parlé. Elles le savent et je pense qu'elles seront encore plus motivées, même si elles le sont toujours à 200%.

 

Journaliste (La Voix du Nord) : Vous disiez que vous étiez à fond derrière l'équipe pour la qualification en 1/8e de finale. Mais quand on est sur le banc des remplaçantes, est-ce qu'on ne se dit pas : "J'espère qu'elles vont se qualifier, comme ça on pourra avoir du temps de jeu sur le 3e match de poules contre le Nigeria" ?

Franchement, je vais vous donner mon avis : pas du tout ! Tout ce qui compte c'est le résultat ! A aucun moment il y a un calcul. On est toutes dans le même bateau. On est un seul groupe, et on veut naviguer dans la même direction. En ce qui concerne notre temps de jeu, si on peut en prendre on en prendra. Et on fera toutes de notre mieux.

 

A propos de la Coupe du monde : « On se rend compte de l'engouement autour de cet enjeu "sociétal" »


Journaliste (L'équipe) : Est-ce que le "phénomène de société"qu'est entrain de devenir cette Coupe du monde féminine de football dépasse largement le nombre de spectateurs dans les stades ?

Oui, quand on voit l'engouement qu'il y a dans les stades, quand on va sur les réseaux sociaux - même si je n'y suis pas tout le temps - on se rend compte de l'engouement, de cet enjeu "sociétal". Et on se rend compte que c'est quelque chose de très positif ! Et on en est toutes ravies ! On espère que ça va continuer dans ce sens. Les résultats vont faire en sorte que ça continue dans ce sens.

 

Journaliste (RMC) : On parlait de l'ambiance au sein du groupe, Griedge est à ce qui paraît le "DJ" de l'équipe. Peux-tu me dire ce qu'elle passe comme musique ? C'est quoi la playlist de l'équipe de France ? Est-ce qu'il y a une chanson qui met tout le monde d'accord ? Par exemple pour les handballeuses françaises qui ont été championnes d'Europe l'année dernière c'était Aya Nakamura. Est-ce que c'est pareil pour vous ?

La "DJ" du groupe, oui en effet c'est Griedge (sourire) ! Elle passe beaucoup de son ! Après la playlist de notre groupe est composée de sons que tout le monde apprécie. Chacune a donné ses titres personnels. Mais c'est vrai que les sons un peu "rythmés", ça met tout le monde d'accord. Mais le nom des titres, je ne les ai pas en tête malheureusement (sourire).

 

Journaliste (AFP) : Dans le staff de l'équipe de France il y a Richard Ouvrard qui est votre "optimisateur de performance". Je crois que c'est l'équivalent d'un préparateur mental. Je voulais savoir comment ça fonctionnait ? Est-ce que c'est sur la base du volontariat ? C'est individuel ? Collectif ? Quels types de conseils apporte t-il ?

Oui, Richard a une place très importante dans le groupe. On est à la fois sur du collectif, de l'individuel et du volontariat. C'est propre à chacune. Mais personne n'est obligé. Richard nous fait faire des exercices qui "boostent" tout le groupe et qui sont très bénéfiques.

 

« Football et architecture sont mes deux passions et m'offrent un équilibre »

 

Journaliste (La Nouvelle République) : Je voulais un peu revenir sur votre métier d'architecte. Vous avez dit que le football et l'architecture "s'alimentaient" mutuellement. Est-ce que vous pouvez développer ? Et d'un point de vue d'architecte, quel est le plus beau stade de ce mondial selon vous ?

(rires) En fait, je ne voulais pas dire que les deux métiers "s'alimentent", mais plutôt qu'ils "m'alimentent", qu'ils m'équilibrent. J'ai vécu selon le rythme "études d'architecture la journée et entraînement de football le soir". Aujourd'hui j'ai la possibilité de jouer au football en tant que professionnelle et donc d'avoir un rythme un peu moins soutenu concernant l'architecture. Football et architecture sont mes deux passions et m'offrent un équilibre.

Pour ce qui est du plus beau stade de ce mondial : je ne vais pas en favoriser un plus que les autres. Ce n'est pas pour faire de la langue de bois. Mais le Roazhon Park de Rennes est un très beau stade, je trouve. Maintenant on a de très beaux stades en France de manière générale. J'aime aussi beaucoup le Matmut Atlantique de Bordeaux qui a été construit par des architectes suisses.


Journaliste (L'équipe) : J'aurais une question sur le jeu de l'équipe de France. Qu'avez-vous pensé des deux premiers matches ? Est-ce que vous avez repéré des domaines où l'équipe pourrait être plus performante en vue du match contre le Nigeria et des 1/8e de finale ?

Je pense qu'il y a toujours des domaines où on peut s'améliorer. On en a parlé entre nous et on travaille en ce sens. Pour être plus précise, peut-être qu'on peut encore s'améliorer dans les derniers mètres, la dernière passe... Des choses comme ça. Mais dans l'ensemble on a quand même montré de très bonnes choses jusqu'à maintenant. Il va falloir s'appuyer sur tout ce qui a fonctionné, et arriver à le mettre en place à chaque match.


A propos de l'équipe des Etats-Unis : « On a vu leur match contre la Thaïlande (victoire 13-0) »


Journaliste (RMC Sport) : Tout le monde en parle : si vous terminez premières du groupe A, il y aura peut-être ce quart de finale contre les Etats-Unis. Evidemment c'est encore loin, mais est-ce que vous avez regardé ce qu'ont fait les Américaines ? Quel est votre avis sur les n°1 mondiales au classement FIFA ?

Mon avis sur les n°1 mondiales c'est qu'elles forment une très bonne équipe. On a vu leur match contre la Thaïlande (victoire 13-0), et le résultat ! J'ai vu chaque but. Comme toutes les équipes de cette Coupe du monde, c'en est une qu'il faudra prendre très au sérieux. Il faudra respecter les Etats-Unis mais être prêtes potentiellement à jouer contre elles en quarts de finale.

 

Journaliste : Vous avez évolué à la fois à l'Olympique lyonnais et à l'AS Saint-Etienne, deux clubs qui possèdent une section masculine qui évolue dans l'élite nationale. Là aujourd'hui, vous évoluez à Fleury (qui évolue en National 2, soit le 4e échelon national, ndlr). Pouvez-vous comparer les trois clubs en terme d'organisation et d'implication dans leur section féminine ? Et est-ce que vous pensez que l'avenir du football féminin en France passe par les grands clubs de Ligue 1 ou Ligue 2 masculine ?

Je ne peux pas comparer les trois clubs que vous avez évoqués. Chacun m'a apporté à titre personnel. Tout ce que je peux dire c'est que ces trois clubs contribuent au football féminin. Et chacun a son échelle. Pour répondre à votre deuxième question, je pense que c'est important qu'aujourd'hui les clubs féminins soient associés à une structure professionnelle, ou qui tend à l'être. A Fleury on en a une, qui n'évolue pas en Ligue 1 mais qui fait des efforts dans beaucoup de domaines et qui essaie de se mettre à la hauteur des structures qui sont en Ligue 1.

 

Journaliste (RFI) : La France a fait ce qu'il fallait pour être déjà qualifiée pour les 1/8e de finale avant le dernier match de poules face au Nigeria. Pour les Nigérianes en revanche ce n'est pas le cas. Elles devront vous battre pour espérer se qualifier pour les phases finales. Que vous a dit Corinne Diacre à propos de cette équipe ?

Ce qu'elle nous a dit évidemment je ne peux pas tout vous dire. Mais de façon générale, le mot d'ordre quelle que soit l'équipe qu'on a à jouer c'est de prendre au sérieux chaque adversaire. Le Nigeria est une équipe à prendre au sérieux, à ne pas négliger. Si on fait cette erreur-là sur un match, on peut vite passer à côté. L'objectif lundi sera de bien finir au classement du groupe A.

 

Journaliste (RTL) : A quoi ressemble la vie de tous les jours hors Coupe du monde pour une footballeuse, qu'elle joue en première division, qu'elle soit internationale ou pas ? C'est peut-être quelque chose que le grand public ignore. De l'extérieur on peut avoir l'impression que vous avez une vie comme vos homologues masculins. Pouvez-vous nous expliquer ce qu'est le quotidien d'une footballeuse hors Coupe du monde ?

A titre personnel, ma vie de footballeuse est une vie tout à fait simple ! Je vis des moments comme tout le monde. Après j'ai l'architecture qui est présente quand je ne joue pas au foot. Mais à part ça je passe des moments simples, avec des amis, la famille etc...

 

« On a quand même la chance pour certaines d'entre nous de pouvoir vivre du football »

 

Journaliste (RTL) : En fait je voulais dire dans l'organisation professionnelle. Certaines joueuse ne gagnent pas leur vie du football en première division. Il y a un contraste entre l'impact médiatique de cette Coupe du monde et le statut réel des joueuses le reste de l'année ?

On a quand même la chance pour certaines d'entre nous de pouvoir vivre du football. C'est à prendre en compte. Mais ce n'est pas le cas de toutes les joueuses encore. J'espère que ça le sera pour beaucoup de joueuses par la suite. On a la chance aujourd'hui de vivre de notre passion et c'est un métier à part entière. Ca demande beaucoup de travail au quotidien. Encore plus pour celles qui ont un travail en parallèle au football.

 

Journaliste (RMC Sport) : Comment occupez-vous vos journées ? Elise Bussaglia nous a par exemple confié tout à l'heure qu'elle lisait un livre en espagnol sur l'entraîneur Pep Guardiola. D'autres jouent au molkky. Et vous, en dehors de vos entraînements, de votre récupération, comment ça se passe ?

Moi aussi j'ai quelques bouquins que je lis. Et puis j'ai mes carnets de croquis d'architecture toujours avec moi. J'aime bien aussi faire quelques photos de temps en temps. Voilà comment je rythme mes moments de repos. Je dors aussi, je tâche de bien récupérer.

 

Journaliste : Maéva, on te suit énormément en D1 depuis Saint-Etienne. On sait que tu es une joueuse qui est beaucoup axée sur la réflexion. Est-ce que tu te considères comme la surprise de ce mondial ? Comment vis-tu cet instant de peut-être pouvoir jouer un match ou quelques minutes d'un match de Coupe du monde ?

La "surprise", je ne sais pas trop. Pour moi en tout cas oui c'était une surprise. Je l'ai appris comme vous, devant la télé. Après pour votre deuxième question : je l'appréhende plutôt bien, je m'y prépare. Comme à chaque match je fais en sorte d'être prête pour éventuellement entrer en jeu, et tout simplement jouer mon jeu, faire ce qu'on me demande de faire sur le terrain pour l'équipe.

 

Journaliste (AFP) : J'ai une question sur les jeunes du FC Fleury. Il y a eu une initiative assez intéressante des U14 garçons qui prenaient les meilleures U15 filles et qui les intégraient à l'entraînement, et même en championnat. Ca permet de les pousser au moment où elles passent les concours pour intégrer Clairefontaine. Comment voyez-vous cette initiative ? Est-ce vous y avez été impliquée de près ou de loin ?

Alors moi je n'y ai pas été impliquée de près ou de loin. Mais je trouve que c'est une démarche intéressante. De manière générale je trouve que le club de Fleury fait pas mal de choses pour ces filles mais aussi pour sa section féminine. Le club essaie beaucoup de mêler la vie des joueurs et des joueuses. Je trouve ça très bien pour le football.

 

***Crédits photo : Guillaume Souvant

Arnaud Le Quéré