Tube du début de saison, Maëlle Garbino, la milieu offensive des Girondins de Bordeaux accumule les bonnes prestations et les buts comme le prouvent ses six réalisations depuis le début du championnat. Une influence grandissante au sein de son équipe, qui a débouché sur une présence dans la dernière sélection de Corinne Diacre. Voici Maëlle Garbino lancée et elle espère que ce n’est qu’un début.
Tu as été appelée en équipe de France pour la première fois en vue de la rencontre contre la Norvège courant novembre. Dans quel état d’esprit est-on au moment de rejoindre le stage?
On y va avec le sourire, avec l’excitation et avec l’envie de juste prendre du plaisir et de voir ce que c’est. C’est vrai que la nuit d’avant, j’étais un peu stressée mais j’avais aussi hâte d’y être pour voir ce que c’est tout simplement.
Cet appel de Corinne Diacre constitue-t-il une consécration ou le début d’un autre chemin?
Je travaille depuis des années pour avoir cette chance. Cette sélection m’apaise. Et au delà d’une consécration, c’est surtout beaucoup de travail. Cet appel m’a énormément fait plaisir. C’est une continuité de mon travail. Il me faut continuer à travailler et comme on dit, le plus dur reste à venir.
Face à la Norvège (1-2), tu es restée sur le banc. Comment as-tu vécu le fait de ne pas être rentrée en jeu et donc de n’être pas encore officiellement internationale?
Pour moi, de faire partie de ce groupe est déjà énorme, comme de pouvoir m’entraîner avec les meilleures joueuses d’Europe. On a toutes envie de rentrer en jeu, c’est normal c’est le football. On joue pour jouer tout simplement. Mais déjà d’être là-bas a représenté une grande fierté et j’étais déjà très contente d’être dans le groupe.
Ça fait quoi d’avoir les projecteurs braqués sur soi comme depuis le début de la saison?
(rires) Je ne dirai pas que j’ai les projecteurs braqués sur moi et en plus je ne pense pas trop à ça. Je pense plutôt au foot, à gagner un maximum de matchs avec mon club de Bordeaux. Je veux avant tout apporter un maximum à l’équipe car c’est le plus important tout simplement.
Tu n’as pas eu peur d’avoir fait le choix de rester à Bordeaux malgré tous les remous vécus par le club cet été?
Je sais que je suis bien ici et Bordeaux est un club qui a toujours été là pour moi. Donc non je ne regrette pas du tout. Je suis très heureuse ici. Pour le moment tout se passe bien.
Comment as-tu vécu la récompense de meilleure joueuse de D1 en septembre?
J’ai été très contente, car on travaille pour gagner des choses individuellement ou avec l’équipe. Mais ce n’est pas que mon travail, mais aussi celui de toute l’équipe, car si les filles ne me faisaient pas de passes, je n’aurai pas pu marquer de buts et ainsi de suite.
Après, je suis très contente d’avoir pu gagner ce titre et j’espère qu’il y en aura d’autres.
"Je préfère être au
coeur du jeu"
On te voit assez polyvalente sur la ligne offensive, quel poste te correspond le mieux?
Moi j’ai été formée à la base en numéro 10. Après c’est vrai que les années suivantes, j’ai beaucoup joué sur le côté. L’an dernier, j’ai été positionnée sur le côté. Moi personnellement, je me préfère au coeur du jeu car je peux plus apporter à l’équipe et parce que je vais moins vite que d’autres filles et sur le côté il vaut mieux de la vitesse. C’est sûr que je préfère être au coeur du jeu.
Tu évolues plus haut sur le terrain qu’à tes débuts, c’est ta volonté?
Je suis une neuf et demi-dix, ça dépend quel système adopte le coach, s’il choisit de me placer milieu côté ou milieu gauche. C’est totalement différent mais je préfère me situer à l’intérieur du jeu, car je trouve que j’apporte plus à l’équipe dans cette position. Le coach donne ses directives, mais je joue libérée et j’essaye de m’adapter à mes coéquipières.
Faut-il avoir du caractère pour réussir au haut niveau?
Dans tous les cas, il faut avoir du caractère pour ne pas se faire manger. Ce qui fait qu’on réussit ou pas, c’est le travail, c’est le talent. Mais il faut surtout beaucoup de travail et ne jamais se reposer sur ses lauriers, car il y a beaucoup de concurrence. Si on veut parvenir au plus haut niveau, il faut donner le meilleur de soi-même.
Tu es plutôt connue pour être un boute-en-train dans un groupe, pour aller plus haut faut-il être individualiste ou demeurer la bonne copine du groupe?
Moi je pense qu’il faut rester soi-même dans un groupe, il ne faut pas essayer de changer pour se faire amie avec telles ou telles. Il faut rester soi-même et on s’adapte à un groupe naturellement. Il ne faut pas chercher à changer les choses.
Tu as montré dès le début de ta carrière que tu savais ce que tu voulais en passant de Lyon à Saint Etienne, tu as senti cette rivalité?
Ça s’est bien passé. Les filles, ce n’est pas comme les garçons. Donc c’est complètement différent.
Quand je suis arrivée à St Etienne, les filles savaient que j’arrivais de Lyon et il n’y a pas eu le moindre problème par rapport à ça. On passe d’un club à un autre, mais ça ne change rien.
Tu as gagné deux titres de championne de France avec l’OL. Quelle saveur ont ces titres pour toi?
Ce sont des titres importants qui restent. Des joueuses n’ont jamais été sacrées. Après j’ai peut être eu peu de temps de jeu à ce moment-là, mais je me sens championne car c’est le groupe entier qui gagne le titre.
Mais en ayant moins de temps de jeu, c’est pas pareil. On n’a peut être pas l’impression d’apporter à l’équipe, donc c’est différent.
Le foot a toujours été important pour toi?
J’ai toujours fait du foot chez moi en Isère, c’est un sport important pour nous là-bas. Le foot m’a toujours attirée.
Je suis partie très tôt à Lyon, dès l’âge de treize ans. Quand on signe à l’OL on sait que tout est mis en place avec un suivi, un sport-études notamment. Je suis partie très tôt, ça a toujours été le foot même si je n’avais pas de posters dans ma chambre. J’ai toujours regardé les matchs, toujours suivi les performances des garçons de l’OL. C’était le club juste à côté de chez moi, donc j’étais fan. Je les suis encore un peu maintenant aussi, mais c’est différent.
Toi, peu importe foot féminin ou masculin?
Oui moi je regarde les deux. Souvent quand on joue le vendredi ou le dimanche, le samedi après-midi je regarde la D1 féminine. Après j’aime bien regarder les matchs des garçons, car c’est complètement différent. Il ne faut pas comparer les deux. Mais je suis surtout fan de la Ligue des champions.
Les autres pays se structurent au niveau foot féminin, crois-tu que la France prend du retard?
On a effectivement l’impression que nous prenons du retard alors qu’à un moment donné on avait de l’avance. C’est dommage qu’on ne mette pas plus de moyens car on voit d’autres pays capables de mettre les moyens et ça en l’espace de peu de temps ils peuvent nous passer devant, je trouve ça dommage pour nous. Et pas que pour nous car je pense aussi aux filles qui sont plus jeunes, qui arriveront plus tard. Mais chez nous, on n’a pas l’impression que ça bouge beaucoup.
L’effet coupe du monde organisée en France en 2019 est vite retombé?
Il y a eu un pic après la coupe du monde mais c’est vite redescendu. Je regrette que les matchs de D1 soient mal filmés, avec la pluie, et des gouttes sur la caméra où on ne voit rien. Les gens n’ont pas forcément envie de regarder un match dans ces conditions et je le comprends. Je me mets à leur place. Les stades constituent aussi un gros problème dans le foot féminin. Il faudrait améliorer ça ainsi que la communication. Il y a pas mal de choses a améliorer pour que de plus en plus de gens aient envie de regarder.
Pour toi, c’est foot, foot, foot ou d’autres sujets t’intéressent-ils?
Je ne regarde que le foot. En plus en ce moment, il y a la coupe du monde. Donc là, je suis axée sur la compétition et j’ai le coeur qui penche pour Messi.
Penses-tu qu’une joueuse doit rester dans son périmètre et ne pas s’exprimer sur l’actualité?
Si les joueuses ou les joueurs se sentent concernés et connaissent le sujet, pourquoi ne pas s’exprimer. Chacun a un avis. Moi personnellement ça dépend des sujets...
Comment vois-tu la suite de ta saison?
J’aimerais que l’on se maintienne le plus tôt possible avec Bordeaux. C’est la priorité pour moi. Individuellement j’aimerais continuer à marquer des buts, faire des passes décisives et continuer à faire des bons matchs.
Bordeaux qui a fini troisième, en 2022-2023 repart sur un autre projet, plus axé sur la jeunesse. C’est aussi intéressant pour toi?
Bien sûr, ça reste intéressant. Beaucoup de choses ont changé, nous n’avons pas les mêmes objectifs que les années précédentes mais cette saison on a un groupe soudé, qui a envie, qui est jeune, qui crée de la continuité et c’est quelque chose d’important aussi. C’est un projet sur quelques années qui se met en place. C’est pas une mauvaise chose. Je fais maintenant partie des plus anciennes dans le groupe. Mais c’est bien car mon statut change et je peux aider les jeunes sur le terrain, les accompagner
Si l’on se revoit pour une nouvelle interview dans dix ans, quelle serait ta carrière rêvée?
Dans dix ans, j’aurai 36 ans. Je n’ai pas forcément de carrière rêvée. Je dirai que je ferai la même chose que ce que je fais à l’heure actuelle. Je ferai les mêmes choix sans rien changer. J’espère juste que ça continue sur la lancée de ma saison.
Et l’étranger, ça t’attire?
Oui bien sûr. Je pense que chaque joueuse dans une carrière a envie de goûter à une expérience à l’étranger, de connaître autre chose. C’est important aussi. Moi je sais que personnellement j’aime bien l’Espagne ou l’Italie. Ce sont des pays qui jouent avec un style que j’affectionne. Mais on verra, on n’y est pas encore.