La semaine dernière, Laetitia Tonazzi postait un message sur les réseaux sociaux et expliquait son choix de mettre un terme à sa carrière. Après 17 saisons au plus haut niveau, une « énième blessure » aura raison de sa longévité. Une révérence tirée non sans émotion et qui donne l’occasion de retracer avec elle les bons comme les mauvais moments, qui ont ponctué sa carrière.

 

Tout juste retraitée des terrains, Laetitia Tonazzi a pris le temps pour revenir avec nous sur ses saisons passées sur le rectangle vert. Une riche et longue carrière qui a duré 29 ans. Rien que ça ! 

L’histoire commence à l'âge de 8 ans, au Plessis-Trévise. Commune du Val-de-Marne où Laetitia découvre sa passion pour le ballon rond « en jouant dans le jardin avec mon frère et mon père », se remémore-t-elle. A l’époque, la petite fille pratiquait trois sports. Le football, bien sûr, mais aussi de la natation et de la danse. Puis, son choix se portera sur le foot « car j’aimais ça, et c’était un sport collectif. J’ai préféré m’orienter vers ça. » 

Un choix qui va l’amener à rejoindre la VGA Saint-Maur, à 14 ans. « Au départ je ne voulais pas quitter les garçons, parce que tout se passait bien. Mais arrivée à un certain âge, on est obligée de partir. » Un club qui reste à proximité, à moins de dix kilomètres de sa ville, mais surtout un club qui était à l'époque « l’un des meilleurs avec Juvisy. » Le FCF Juvisy (désormais Paris FC), rival francilien de la VGA. La prochaine destination de Tonazzi.

 

Juvisy : une belle histoire, sans « happy ending » 

 

La vingtaine, la native de Créteil débarque dans l’Essone et va y rester 11 ans. Plus d’une décennie, durant laquelle elle va se faire un nom, un surnom « Toto », et le début de son palmarès sportif. « J’ai appris pas mal de choses là-bas, mon football a grandi là-bas. Il y avait beaucoup d’internationales aussi, c’est un peu impressionnant quand on arrive. » Une belle histoire, de bons moments, sans aucun doute parmi les meilleurs : « Il y a des choses que je n’ai jamais vécu ailleurs », se souvient-elle. Mais, une fin un peu ternie par un départ manqué. 

À l’issue de la saison 2010-2011 où la Juvisienne termine meilleure buteuse, elle décide d’aller tenter l’aventure professionnelle.. à Lyon. Le choix du club rhodanien ne ravit pas, notamment en raison de la rivalité entre les deux clubs. Mais, l’attaquante voulait expérimenter ce nouveau challenge : « Je pense qu’il n’y a pas grand monde qui part à Lyon à plus de 30 ans. On se demande ce que ça va donner, mais je ne regrette en rien mon choix. » 

 

Lyon : le début de l’aventure professionnelle

 

Un changement de vie radical pour la trentenaire qui va alors découvrir une rigueur supplémentaire aux côtés de Patrice Lair, coach des Lyonnaises à l’époque. « Il n’y a pas de droit à l’erreur. On était sur notre dos constamment, ça pouvait être épuisant par moments. Mais c’est comme ça qu’on progresse », constate-t-elle avant d’ajouter une petite anecdote : « Quand je suis arrivée, je parlais avec le préparateur physique et je lui dis : "Je serais moins fatiguée. À Juvisy j’allais travailler et je m’entraînais le soir à 19h30". Il m’a dit : "Ne parle pas trop vite, tu verras". Et au final, oui j’étais plus fatiguée à Lyon qu’à Juvisy. Ça demande tellement d’implication physiquement et psychologiquement. Il faut prouver sans cesse. »

Prouver, se battre pour sa place. Cela n’a jamais dérangé Laetitia. Bien sûr, face à la concurrence, aux internationales, comme Lotta Schelin, elle savait à quoi elle se frottait en signant dans le Rhône. « Patrice (Lair) savait gérer les joueuses, je n’ai jamais eu de soucis avec le fait d’être remplaçante. Il arrivait à nous faire se sentir concernées à chaque match, alors si je me retrouvais sur le banc, je ne l’ai jamais mal vécu. »

 

Équipe de France : des rêves envolés 

 

Si en club tout se passe pour le mieux, la carrière de Tonazzi n’est pas un long fleuve tranquille. Malgré 66 sélections et 15 buts, elle a connu avec l’équipe de France plusieurs déceptions dont elle ne souhaite plus parler aujourd’hui. Pourtant, l’histoire commençait bien. Sous Elisabeth Loisel, à tout juste 22 ans, la jeune joueuse s’envole pour les États-Unis et va disputer la Coupe du Monde 2003. La première phase finale de l’histoire des Bleues dans cette compétition mythique. Une élimination dès les poules, mais des souvenirs toujours intacts quinze ans après : « Ça date, mais je pense que c’était mon meilleur souvenir tout simplement », sourit-elle.

 

Pour réconfort, Tonazzi a pu construire une carrière à l’échelon national plus épanouie. Deux doublés Coupe-championnat avec Lyon en 2013 et 2014, mais elle ne connaîtra malheureusement pas la joie de soulever le trophée de la Champions League, avec une finale perdue en 2013 face à Wolfsburg. Cette année-là, Lyon a joué sa demi-finale face à Juvisy. Entrée juste avant l’heure de jeu, Laetitia va marquer à deux reprises : « Forcément marquer un doublé à Juvisy, j’étais contente. Mais c’est normal, quand on joue contre son ancien club on veut marquer les esprits. »

La Ligue des Championnes, une compétition que Tonazzi aura l'occasion de rejouer une dernière fois, à 37 ans. Cette fois-ci sous les couleurs de Montpellier, club qu’elle a rejoint il y a quatre ans. Un quart-de-finale de Champions League, perdu certes mais qui n’enlève rien au plaisir éprouvé sur le terrain. « J’étais super contente, surtout que j’étais blessée pleins de fois et le coach m’a fait confiance pour me faire jouer titulaire au match aller contre Chelsea », dit-elle, reconnaissante envers Jean-Louis Saez. 

 

Une blessure qui dure et le début de la galère

 

Ses dernières saisons dans l’Hérault vont être tronquées par une longue blessure. Un problème récurrent au pied droit. Tout commence en novembre 2016 avec une déchirure de l’aponévrose plantaire. « On a tenté pleins de trucs, des injections de plaquettes sanguines, des infiltrations, des ondes de chocs » mais rien n'a permis d'obtenir une amélioration durable. Dernier rayon de soleil à l’été 2017 avec du mieux et une prolongation de contrat d’un an. Une marque de confiance et une chance pour laquelle elle remercie le MHSC, encore aujourd'hui. La suite est moins heureuse,  avec une fracture de fatigue du quatrième métatarse.

Cela l’éloigne des terrains jusqu’en janvier 2018. Son dernier tour de piste. Puisque début avril, peu après le match face au PSG, Laetitia se blesse une nouvelle fois, « je sentais que ça allait arriver. J’avais trop mal au pied. »  Cette fois, elle arrête les frais et met un terme à sa carrière. Une décision qu’elle avait déjà pris avant cette dernière blessure, mais elle souhaitait « bien finir » même si « le destin en a voulu autrement. »  

Si la numéro 9 héraultaise n’a peut-être pas eu la fin rêvée, elle a tout de même pu connaître des dernières émotions. « Au moins, mon dernier match, j’ai joué titulaire face au PSG. C’était un gros match et on a gagné en plus. » Un dernier match contre le Paris Saint-Germain, face à son ancien coach, Patrice Lair. Un signe du destin, sans doute, pour celle qui aime les « garçons du PSG depuis toute petite », mais qui a toujours refusé de rejoindre le club de la capitale. Pourtant, aujourd’hui elle admet que « ça fait peut-être partie de mes regrets. Certaines joueuses de Paris m’avaient dit de venir mais j’ai dit non. Voilà ça ne s’est pas fait, c’est un petit regret, mais c’est pas grave. » 

À l’époque, quand elle en a eu l’occasion, "Toto" avait préféré rejoindre Lyon plutôt que le PSG. Ce choix lui vaudra notamment son plus beau but. « C’est vrai que celui qui m’a le plus marqué c’est le lob [de plus de 40m, ndlr] face à Paris, avec Lyon. Je pense que c’est le plus beau que j’ai mis. Peut-être pas le plus important, mais pour ma part, c’était un des plus beaux puisque c’est un geste technique difficile. »

 

 

La tête tournée vers l'avenir

 

Désormais, la page « joueuse » se tourne pour la Cristolienne, mais elle a déjà la tête remplie de projets pour la suite. « J’aimerais être préparatrice physique. Je vais passer au mois d’octobre, si tout va bien, un BPJEPS Activité de la forme option musculation haltérophilie. » 

Une idée de reconversion qui lui ait venu naturellement, parce qu’elle « aime ça ». Mais aussi, avec ses blessures. « Le fait d’avoir été blessée j’ai travaillé le physique tout le temps, de la muscu aussi beaucoup (rires), c’est vrai… Finalement, c’est peut être ça qui m’a aiguillé vers cet avenir », avoue-t-elle. 

Un diplôme de 9 mois, intense, attend donc la jeune retraitée à partir de l’automne prochain : « C’est comme si on retourne à l’école. Faut se consacrer à 100%. » Mais avant de se plonger dans les études, Laetitia Tonazzi pourrait bien s'adjuger un dernier trophée, si le MHSC venait à soulever la Coupe de France cette saison. Un dernier défi qu'elle vivra depuis le bord du terrain avant de tourner la page d'une carrière d'ores et déjà accomplie.

 

Le palmarès de Laetitia Tonazzi

4 Championnats de France : 2003 et 2006 (Juvisy FCF) / 2013 et 2014 (Olympique Lyonnais)

1 Challenge de France et 2 Coupes de France : 2005 (Juvisy FCF) / 2013 et 2014 (Olympique Lyonnais)

2 titres de meilleure buteuse du Championnat de France : saison 2007-2008 (27 buts) et 2010-2011 (20 buts) avec Juvisy

Photo : Fred LG

Morgane Huguen