Présent pour disputer la Aiglonnes Cup à Fontainebleau, Gérard Prêcheur peaufine son équipe en vue de la saison chargée à venir, avec plusieurs compétitions à gérer pour lui et le Paris Saint-Germain, dont la Ligue des Nations et les playsoffs en fin d'exercice, qui se sont ajoutés au championnat et la Champions League !

 

Cœurs de Foot - Coach votre ressenti sur ce match [nul contre le MHSC, 0-0] ? Est-ce que vous avez mis en place tout ce que vous attendiez ?

Oui absolument, vraiment ! Déjà sur le plan du rythme, on se rapproche de la compétition officielle face à un club qui est dans le top 4, dans le top 5 de la D1, qui est Montpellier, un très bon club et une très belle équipe.

On sent déjà qu'on se rapproche [du début de la compétition], on n'est plus dans la préparation, on est dans ce que j'appelle moi, la pré-compétition.

On va également affronter deux clubs internationaux la semaine prochaine (Liverpool et AC Milan, ndlr) donc ça sent bon la compétition. Après c'est difficile avec l'effectif, qui est réduit, il y a toujours une ou deux blessées, Oriane [Jean-François] et Marie [Katoto] qui vont j'espère être bientôt de retour, plus les internationales, qui sont allées loin [au mondial], les deux Hollandaises (Lieke Martens et Jackie Groenen) [la Suissesse, Ramona Bachmann], et les cinq Françaises (Constance Picaud, Elisa De Almeida, Sakina Karchaoui, Laurina Fazer, Grace Geyoro, sans compter Aissatou Tounkara, qui vient de signer, qui a joué ce match ndlr) qui ne sont pas là. Il faut qu'on gère ces trois matches avec un effectif un peu plus réduit, mais c'est bien ce qu'elles ont produit. 

 

Journaliste - On vous a vu tester différents schémas tactiques, est-ce que c'était quelque chose de circonstanciel, adapté à l'effectif ou c'est quelque chose que vous êtes susceptible de reproduire ?

Oui ! Les deux. On n'a pas pu le faire l'année dernière, pour des raisons [...] je ne vais pas revenir sur l'effectif.

Ce que je faisais à Lyon, ce que j'ai fait partout où je suis passé, c'est bien d'alterner avec deux systèmes de jeu, qui sont parfaitement compatibles. Le 4-3-3 et le 3-5-2, ce sont deux systèmes de jeu, qui sont compatibles et adaptés à mes orientations de jeu. Donc c'était bien qu'on les prépare, que je vois où on en est dans ce registre-là, surtout que défensivement on est un peu plus étoffé, il y a beaucoup de satisfaction, alors que ce n'est pas simple.

Pour certaines c'était la première fois qu'on jouait en 3-5-2, donc c'est bien, on va alterner les deux et on verra en fonction du moment, des joueuses, du Paris Saint-Germain, et peut-être des fois en fonction de l'adversaire, on pourra opter [pour tel ou tel système]. Mon objectif c'est qu'on puisse alterner entre l'un et l'autre.

 

CDF - Le capitanat est-il déjà hiérarchisé ?

Non, on va attendre déjà que tout l'effectif soit là, pour le moment comme je vous l'ai dit, il y a quand même pas mal de joueuses absentes. Normalement tout le monde va être là à Toulouse, donc on aura le temps d'aborder cet aspect-là.

En tout cas Sandy [Baltimore], qui fait un début de saison tonitruant, elle le porte très très bien pour le moment le brassard de capitaine.

 

Journaliste - Elle veut montrer aussi des choses ?

Il faut lui poser les questions à elle (léger sourire), mais en tout cas, elle est là depuis [des années]. Nous on était très proche d'elle pour qu'elle retrouve la confiance, son potentiel et elle est très performante depuis la reprise.

 

CDF - Justement coach vous l'avez dit c'est une équipe à reconstruire cette saison encore une fois, vous avez beaucoup de blessées, d'absentes, de départs ?

Oui il y a eu beaucoup de départs, on a que deux blessées, et encore je pense que Oriane est bien suivie, ça ne devrait pas tarder je pense. Oui il faut reconstruire avec des nouvelles joueuses que je ne connais pas, mais qui adhèrent bien. 

 

"On se prend moins

la tête"

 

Journaliste - En parlant des joueuses sur lesquelles vous pouvez vous appuyer, on a vu Laurina Fazer, qui évolue un peu plus haut sur le terrain, un peu plus comme une meneuse de jeu. Est-ce une position dans laquelle vous allez la mettre ?

Oui bien sur, elle a cette capacité de se projeter. Ce qui est super - au-delà de l'aspect tactique qui est satisfaisant - c'est que j'aime, je retrouve la fraicheur du football féminin, qui me semblait qu'on avait un peu perdu en France.

C'est une nouvelle [renaissance], ces nouvelles qui viennent de l'étranger et nous au Paris Saint-Germain, je trouve qu'on a une fraicheur d'esprit sur le terrain, pas uniquement physique, où on joue, on se prend moins la tête et c'est vraiment agréable. 

 

CDF - Comment voyez-vous cette saison qui arrive, avec un tout nouveau format, Canal qui ne va pas diffuser tous les matches et surtout les playoffs qui arrivent ?

En tout cas concernant la nouvelle saison, je ne peux pas me prononcer tant que je ne connaitrais pas la fin du mercato, aujourd'hui on a perdu Kadi [Diani], donc tant que je ne connaitrais pas la ou les joueuses qui vont compenser son départ, je ne pourrais pas me prononcer sur la prochaine saison, au niveau d'objectif(s) je parle.

 

Journaliste - Le fait qu'il y ait des playoffs, ça laisse la porte ouverte...

Non les playoffs pour moi c'est incroyable d'avoir mis les playoffs, c'est fou qu'ils aient réussi à faire passer ça et quand ? Je ne sais pas, comme des grands politiques...

Trois choses concernant les playoffs : un, durant la période de covid quand je suis rentré de Chine, j'ai travaillé pour la FIFA et à la FIFA, il y avait un discours : "Le même football pour tous". Donc pourquoi tout d'un coup on va inventer des playoffs ? Alors que chez les garçons ça n'existe pas.

Deuxième point, on a deux compétitions magnifiques en France, chez les garçons et les filles, une compétition d'endurance : le championnat ! C'est tellement beau un championnat ! Donc avec cette épreuve d'endurance, regardez l'année dernière comment c'était passionnant. La première place entre Lyon et nous qui essayons [de prendre la place de leader], on a même été premiers à la trêve. Donc la compétition entre nous et Lyon, la compétition entre Paris FC, Fleury, Montpellier pour la troisième place, le maintien [qui était disputé] c'était magnifique. On a fait un match au Parc des Princes, devant 20000 personnes contre Lyon, avec les playsoffs il n'a plus de raison d'être [ce choc OL/PSG], il n'existera pas. Le championnat va perdre toute sa fraicheur, donc tout cela pour quatre matches à la fin ?

Troisième problème, l'équité ! Vous imaginez Lyon qui a fini [premier au terme de la saison] (léger blanc) parce que en plus de cela les playsoffs qu'ils mettent en place, ceux qui ont fini premier ou deuxième, [n'ont] aucun avantage. Tout en 90 minutes, même pas d'aller-retour. Lyon qui a fini avec 20 points de plus que le quatrième, nous qui avons fini [avec] treize points sur le troisième, on va remettre notre première et deuxième place [en jeu] en 90 minutes ? Ça arrange qui ? A qui profite le crime ? Car c'est pour moi un crime, sur le plan sportif, mais je ne vais pas citer à qui cela va profiter. Mais je pense que tout le monde n'est pas aveugle pour savoir à qui va profiter ces playsoffs, et qui les a mis en place.

 

Journaliste - Si on prend votre exemple, Diani qui prend une suspension en fin de saison et qui se blesse, c'est une joueuse clé et elle n'est pas là sur les playsoffs ? 

Voilà, par exemple. Mais déjà [ça biaise] l'équité ! Je sais pourquoi cela a été mis en place et c'est comme ça...

 

Journaliste - Aïssatou Tounkara a joué son premier match avec le Paris Saint-Germain. Comment l'avez-vous trouvé sur ce match ? Qu'attendez-vous d'elle, à la fois sur le groupe d'un point de vue de l'expérience, mais aussi sur le terrain ?

Apporter son expérience, son potentiel, elle a besoin de jouer, on voit qu'elle manque encore un petit peu de rythme, mais malgré cela elle fait un très bon match, comme toutes les autres. Elle a une soif de jouer, comme beaucoup, donc on va s'appuyer sur cela et c'est vrai qu'elle a l'expérience internationale donc c'est bien.

 

Journaliste - Elle fait partie de ces joueuses qui peuvent apporter la fraicheur que vous évoquiez tout à l'heure ?

Absolument ! 

 

CDF - J'imagine que vous avez suivi le mondial, notamment tous les matches de l'équipe de France. Deux mois [pour Hervé Renard et les Bleues] ce n'est pas suffisant pour aller au bout ?

J'ai suivi le mondial, je dirais qu'une chose sur cela, c'est que les résultats sont d'une cohérence extrême. Ça c'est le premier point. En finale on a l'Angleterre qui est championne d'Europe en titre, on a face à elle l'Espagne qui est fait championne du monde des U20, et qui a l'équipe qui a gagné la Champions League.

Vous me parlez de l'équipe de France... Lyon quart de finale de la Champions League (éliminé par Chelsea aux tirs au but, ndlr), Paris Saint-Germain quart de finale de la Champions League, l'équipe de France quart de finale de la Coupe du monde, tout cela est cohérent.

Puis le deuxième point c'est toute cette fraicheur qu'il y a eu de ces nouvelles nations, j'ai cru revenir plus de vingt/vint-cinq ans en arrière quand j'ai découvert le foot féminin, lorsque j'ai vu certaines nations, comme l'Argentine et autre, jouer pour le maillot, ne pas se poser de questions, rien calculer, j'ai trouvé cela super. Par rapport à certaines nations plus expérimentées, je ne les citerais pas (léger sourire), qui sont calculatrices, ne proposant pas de jeu... L'équipe qui a la meilleure qualité de passes à gagné et est championne du monde.

 

"On n'a pas les effectifs pour pouvoir jouer

toutes ces compétitions"

 

CDF - Que pensez-vous de la Ligue des Nations ? C'est une bonne nouvelle qu'elle arrive chez les féminines ?

Ça va être compliqué pour les filles [de l'équipe de France] déjà. 

Je ne sais pas. Je pense qu'on n'a pas les effectifs aujourd'hui au sein des clubs pour pouvoir jouer toutes ces compétitions, je fais référence à toutes les blessées qu'il y a dans le foot féminin, le nombre de croisés dans tous les clubs et d'autres blessures graves...

Je me dis que les années passées, on échangeait avec Corinne Diacre sur des matches de préparation amicaux, elle pouvait gérer, on faisait le point, là les sélectionneurs surtout ceux qui n'ont pas gagné, ils ne vont rien gérer, ils vont vouloir la gagner, car ce ne seront que des matches officiels. Comment on va faire dans les clubs ? J'ai calculé si on a l'opportunité, au Paris Saint-Germain de se qualifier en Champions League, je crois que c'est 27 matches jusqu'en décembre, 27 matches officiels ! 

 

Journaliste - Il y a des joueuses qui peuvent terminer avec 60 matches officiels, et la France doit gérer les Jeux Olympiques ? Avec des matches de plus en plus intenses aussi ?

Oui des matches de plus en plus intense également et qu'est-ce que ça va donner à la fin ? J'émets [des réserves], mais de toute façon c'est parti.

Mais l'année dernière, c'était très dur pour nous, parce que c'est toujours nous les clubs, en tout cas c'était comme ça mon point de vue au Paris Saint-Germain, qui ont géré pour faciliter les internationales [en sélection] et qu'elles ne se blessent pas. Comment on va faire ? Ça va être une grosse question.

Dounia MESLI