Le Conseil de la FIFA a adopté vendredi une nouvelle réglementation, permettant d'assurer un minimum de garanties pour les joueuses souhaitant avoir des enfants au cours de leur carrière. Un enjeu, puisque selon une étude réalisée par le FIFPRO (syndicat international des joueurs) en 2017, près d'une joueuse sur deux (47%) ferait le choix d'arrêter plus tôt sa carrière de footballeuse pour fonder une famille.

 

Un nouveau cadre

Si le projet de réglementation avait été dévoilé depuis plusieurs semaines, il a désormais été voté par les instances de la FIFA, instaurant un congé maternité d'une durée minimale de 14 semaines, avec la garantie de percevoir au moins les deux tiers de son salaire habituel, à partir du moment où la grossesse intervient pendant la période du contrat.

Des conditions minimales qui s'appliquent sauf si la législation nationale est plus favorable. À titre d'exemple, les congés maternités sont d'une durée minimale de 16 semaines en France. Ce droit à la maternité pour les joueuses s'accompagne de la possibilité de revenir dans son club à l'issue de la grossesse, ou encore de celle de recruter temporairement une nouvelle joueuse en remplacement.

Le texte de la FIFA prévoit également des sanctions en cas de rupture abusive du contrat, c'est-à-dire lorsque le club y met un terme parce que l'une des ses joueuses attend un enfant.

Un cadre censé s'appliquer partout dans le monde, et qui doit désormais se confronter au réel, avec peu de joueuses, notamment au plus haut niveau, qui font le choix d'avoir un enfant pendant leur carrière, au risque de perdre leur place dans leur club ou en sélection. Les contrats souvent plus courts dans le football féminin, sont aussi dissuasifs pour permettre de se projeter, et envisager sereinement d'élever un enfant en parallèle de sa carrière.

 

Quand les sportives font bouger les lignes

Pourtant, cette question semble désormais être pris en compte plus largement. Aux États-Unis, la grossesse d'Alex Morgan et la naissance de sa fille au printemps ont été largement médiatisées, suivant celle d'autres anciennes championnes du monde américaines, Amy Rodriguez et Sydney Leroux. Coéquipière d'Alex Morgan au Pride d'Orlando. Sydney Leroux, avait évoqué en début d'année, pour le magazine Forbes, le fait que les dépenses pour la prise en charge de ses enfants étaient aujourd'hui plus élevées que le salaire qu'elle percevait en tant que joueuse d'Orlando. 

Une situation qui peut aussi concerner les entraîneures, à l'image de l'épreuve vécue par Emma Hayes, coach de Chelsea en Angleterre, enceinte de deux jumeaux, mais avec un seul enfant arrivé à terme. Une fausse couche qui serait intervenue lors d'un match de championnat face à Arsenal au printemps 2018, alors qu'Emma Hayes dirigeait son équipe depuis le bord du terrain. 

Visibiliser pour normaliser la démarche de maternité des sportives de haut niveau, alors que l'équipementier Nike a été contraint de modifier ses pratiques sur le sujet. Fin 2018, Plusieurs athlètes américaines avaient alors dénoncé des clauses de leurs contrats consistant à réduire, pendant leur période de grossesse, les revenus de sponsoring perçus par les sportives sous contrat avec Nike.

À l'été 2019, la direction de l'équipementier a finalement annoncé vouloir mettre fin à ces pratiques. Alex Morgan avait été une des premières à bénéficier de ce changement de politique, avec un nouveau contrat qui lui assure 18 mois de revenus garantis pendant et après cette période de grossesse, qu'elle soit ou non en capacité de jouer au football.

 

La FIFA s'insère dans le mouvement

Pour les internationales américaines, cette période de grossesse s'accompagne du paiement de 75 % de leur salaire par la fédération (qui est leur employeur) sur une période qui peut durer jusqu'à un an, auquel s'ajoute une « transition » de deux à trois mois pour permettre aux joueuses de revenir à leur meilleur niveau.

En Espagne, la mise en place d'une convention collective début 2020, et la professionnalisation de la première division (Primera Iberdrola), est passée notamment par l'introduction de dispositions relatives à ces questions. Par exemple, un article de la convention précise qu'une joueuse a la droit de demander la prolongation d'un an de son contrat pour une année supplémentaire, si sa grossesse intervient pendant la dernière année de son contrat.

Les règles adoptées par la FIFA ce vendredi participent donc de cette réflexion plus globale, et de la nécessité de prendre en charge ces aspects pour éviter que les athlètes de haut niveau soient contraintes de choisir entre leur volonté de fonder une famille et celle de poursuivre leur carrière de sportive professionnelle.

 

Photo: Sydney Leroux Dwyer (Sydney Leroux confortée par sa coéquipière du Orlando Pride, Alanna Kennedy, alors qu'elle faisait son retour à la compétiton, le 29 septembre 2019, trois mois après la naissance de son second enfant)

Hichem Djemai