Pour son premier match officiel à la tête de l'équipe féminine du Paris Saint-Germain, Didier Ollé-Nicolle a assumé le rang de champion de France de ses joueuses acquis la saison dernière, avec une écrasante victoire 5-0 face à Fleury et une prestation de haute volée. 

 

Coeurs de Foot - Coach votre réaction sur cette victoire du Paris Saint-Germain, vos joueuses ont mis en pratique ce que vous leur avez enseigné, ce 5-0 il fait plaisir, c'est un début de saison qui fait du bien ?

Didier Ollé-Nicolle - Il fait du bien à l'équipe car on a fait une grosse préparation. Il y a eu beaucoup de gens qui ont critiqué le fait que je sois là avant le match, mais bon c'est comme ça. L'idée était de travailler pour le mois d'octobre et le mois de novembre où il y aura beaucoup de matches et où il va y avoir beaucoup de volume donc il faut éviter les blessures. 

Sachant qu'il manquait beaucoup de joueuses cadres, du fait des jeux olympiques, du fait du recrutement. On avait beaucoup de jeunes joueuses, avec qui j'avais un aspect pédagogique pour leur montrer ce qu'était le haut niveau. Venant du monde des hommes, j'ai calqué la préparation comme si elles étaient des professionnelles. 

Les filles ont eu beaucoup de mal à digérer, elles n'ont eu pas de jambes et aux niveaux des matches amicaux, il manquait 2-3 mètres, mais ce n'était pas grave. Vous les connaissiez, je les connaissais, sur les 3 dernières semaines, on a beaucoup axé sur notre jeu, sur notre organisation et ça s'est vu. On fait des séances très agréables et ces dernières semaines ont été faites pour préparer ce match. 

Démarrer chez nous avec beaucoup de récupération, de jeu haut, de répétition par les côtés et beaucoup de mouvements. Et comme vous l'avez dit les filles ont vraiment répondu présentes et je suis très satisfait de leur prestation.

 

Coeurs de Foot - Est-ce que le seul bémol c'est de ne pas avoir marqué sur coups de pied arrêté ?

Oui, mais c'est aussi un axe de travail mais très sincèrement, on a beaucoup travaillé les corners, notamment offensifs et on a vu qu'on était dangereux mais on n'a pas travaillé les coups-francs directs. On devait commencer à travailler hier et avant-hier, mais je me suis fait un peu prendre par le temps, la séance était déjà bien longue. On a plein d'axes d'amélioration.

 

Journaliste - Vous vous attendiez à un tel résultat ?

Pas du tout parce que je découvre mon équipe. Première fois que j'entraîne réellement pour le Paris Saint-Germain, première fois que j'entraîne en compétition officielle avec le PSG. 

Sur nos prestations, notamment le Bayern qui, il y a 15 jours, avait mis 5 buts à la Roma et 4 à Lyon alors qu'on en prenait 5 contre Lyon. Il y a un gap qui est terrible. Quand on a joué le Bayern, on avait fait 2-2 en menant 1-0 à la 45ème et en étant menés 1-2 à la mi-temps. 2 minutes d'étourderie et en deuxième mi-temps, on s'est repris en main en étant dominant. 

C'était bon signe, il fallait éviter ces petites erreurs. Lyon (contre Portland) et le Bayern (contre Louisville) jouaient des équipes américaines, elles ont été battues. On est la seule équipe qui en avait battue une (contre Chicago). Il y avait plein de signes positifs mais dans la compétition réelle, je découvre le championnat féminin, je découvre aussi mon équipe mais je ne m'attendais à rien du tout. Je leur ai dit aux filles de jouer un vrai match collectif par rapport à nos principes, je ne veux pas un match de guerre.

 

Journaliste - Sur la D1 Arkema

J'ai beaucoup analysé (le championnat) car je ne connaissais pas. Je connaissais que Lyon, le Paris Saint-Germain et l'Equipe de France. Des gros matches mais je ne connaissais pas les autres équipes, les autres joueuses. J'ai regardé beaucoup des matches de toutes les équipes de l'année dernière pour me donner une idée, connaître les joueuses et j'ai trouvé que ça avait énormément évolué par rapport à ce que je connaissais. 

Pour avoir joué contre Bordeaux en amical, j'ai trouvé que c'était une très bonne équipe. Elles ont été très intéressantes, une équipe très regroupée et une attaque très rapide avec des joueuses offensives et très rapides. 

On a étudié Fleury durant leur préparation mais très sincèrement, on s'est vraiment occupés à 90/95% que de nous et ce sera toujours le cas. Quand j'entraînais chez les garçons, c'était exactement la même chose. Je considère que si on s'entraîne tous les jours, c'est pour avoir un style et après on l'adapte un peu par rapport à l'adversaire suivant leur individualités, leur style. Si on aurait joué contre Montpellier, Guingamp ou une autre équipe, on aurait essayé de faire les mêmes choses en tenant compte de nous, avant tout. Après, il y a toujours l'idée de ne pas être surpris.

 

Journaliste - On a vu une équipe parisienne très agressive, offensive, c'est le style que tu veux instaurer chez l'équipe ?

(sourire) Je ne parle pas de mon style, par rapport aux adversaires. Ca peut être différent. Le ballon va toujours plus vite mais lui, ne se fatigue jamais. Un des messages que je souhaite passer aux filles et qui m'a marqué est que dans le football féminin, même une très bonne joueuse la touche une, deux ou trois fois avant de la donner et l'idée c'est de jouer beaucoup plus en deux touches de balle, on prend on donne. 

Ca suppose du mouvement combiné, se déplacer avec 3 milieux et avec une qui décroche, ça suppose des déplacements différents pour les deux autres. Il faut que ce soit notre adversaire qui doit nous chercher, que ce soit eux qui doivent s'adapter à nous. L'idée est de faire vivre ce ballon, d'essayer de gérer temps forts/temps faibles et sur le match d'aujourd'hui, je suis satisfait.

 

Coeurs de Foot - On vous a vu extrêmement communiquer avec vos joueuses. Sur le match des parisiennes qui étaient plus dans l'action que dans la réflexion. C'est aussi important dans le foot féminin d'aller vite ?

Je ne sais pas, je découvre (rires). [...] J'ai lu dans la presse que c'était surprenant que j'entraîne [le Paris Saint-Germain], qu'on m'ait choisi, que j'avais rien fait avec les hommes ces derniers temps mais dans une autre vie, c'est possible. Deux ans en arrière, j'étais au trophée des entraîneurs de Ligue 2 où j'ai fini deuxième derrière [Pascal] Gastien. Sans fanfaronner, j'avais l'équipe qui avait le plus petit budget. Donc peut-être que quand on connaît un peu le football, des fois ça marche mais des fois non. Aujourd'hui, je suis content d'entraîner le Paris Saint-Germain filles et que mon équipe, sur le premier match, ait fait ce match-là. Comme on le disait, la critique est tout le temps facile. J'ai beaucoup à apprendre.

 

Coeurs de Foot - Ils vous ont jugé un peu vite, sans vous laissez la chance de leur prouver ?

Oui je trouve que c'est bête. Il y a deux ans en arrière, je suis nommé aux trophées de l'UNFP et tout le monde sait ce que j'ai fait pendant 4 ans à Orléans, c'est mon avant-dernier club. Quelque part, l'équipe ressemble à l'entraîneur, on essaie d'avoir des principes, un style. Des fois ça prend, des fois ça ne prend pas. Et quand je lis ça, sans qu'on me connaisse, je trouve que c'est con, c'est tellement facile.

 

Journaliste - Sur les recrues, récemment arrivées au PSG

Je ne sais pas. Les deux gardiennes (Barbora Votíková et Stephanie Labbé) sont arrivées, une a fait une séance, l'autre deux ou trois. Elles avaient jamais vu l'équipe jouer. L'idée était qu'elles apprennent, qu'elles aient vu le match, par rapport à nos principes. Amanda [Ilestedt] était avec nous aux Etats-Unis mais avait mal au genou et ne s'est presque pas entraînée, n'a pas fait les matches amicaux. 

Il faut trouver le moment opportun par rapport au degré de connaissance de l'effectif, de nos principes. Stephanie [Labbé] avait eu un petit problème aux côtes et Amanda [Ilestedt] au genou mais ça va beaucoup mieux pour elles et le fait qu'elles n'aient pas joué ce week-end, qu'elles fassent une semaine normale, elles peuvent postuler pour Montpellier ou pour Soyaux, c'est un objectif.

J'étais très content de ce qui s'est passé pendant ces trois semaines, les deux derniers matches amicaux et l'équipe qui a joué aujourd'hui et c'est celles qui avaient le plus de temps de jeu possible. Qu'on ait gagné, qu'on ait joué 48 heures après, contre Chicago, j'ai fait jouer l'équipe pratiquement tout le match pour qu'elles prennent du rythme et de la complicité.

 

Journaliste - Sur Ramona Bachmann et son but 

Ramona a joué contre Chicago. J'ai ménagé Sandie Baltimore là-bas donc c'était l'une ou l'autre. L'idée sur un premier match, de mettre le plus de complicité, de filles qui jouaient ensemble la saison dernière. Sur les matches de préparation, la relation Karchaoui-Baltimore a tout de suite fonctionné, depuis 2 ou 3 matches, elles ont eu le temps de jouer ensemble. 

Sur le côté droit, j'attendais Ashley [Lawrence] parce qu'avec Kadi [Diani], elles ont l'habitude. On savait qu'on allait jouer contre une équipe très renforcée et qu'il fallait sans arrêt, varier au niveau du milieu de terrain, beaucoup passer par les côtés pour les user. On marque le premier but en venant de la gauche, le deuxième but à droite, le troisième but sur une frappe. Si on veut avoir un style, il faut que les filles travaillent ensemble, s'entraînent et s'apprennent à se connaître. 

Et Ramona [Bachmann], dans notre style, il faut être capable de se déplacer 2 ou 3 fois sans toucher la balle. Elle apprend, ce n'est pas du tout son style. Quand je dis ça, il y a des filles qui apprennent une nouvelle façon de jouer, que ce soit [Sandy] Baltimore, Kadi [Diani], Marie [Katoto], elles ont beaucoup de qualités individuelles, de force mais elles ne faisaient pas la différence sur le plan collectif, dans la relation du jeu entre elles. 

Mais l'idée est de garder leurs forces individuelles, leur qualité individuelles et de varier [notre jeu] pour que ce soit plus compliqué pour l'adversaire. De temps en temps, venir à l'intérieur du jeu pour aller vers les latérales, de temps en temps percuter. Ramona était blessée pendant la préparation et ça ne fait que 15 jours qu'elle s'entraîne avec nous et on se rend compte que pour l'instant, c'est une fille qui a des jambes extraordinaires, sur la façon de se retourner comme le but qu'elle a marqué. Au niveau du jeu combiné, elle a de gros progrès à faire pour devenir - elle est déjà une grande joueuse internationale - mais l'idée est d'arriver au très haut niveau. Le fait d'avoir deux armes, la qualité individuelle en plus d'être un maillon d'un collectif, ça peut leur permettre de grandir.

 

Propos recueillis par Dounia Mesli au Camp des Loges

Karim Erradi