Championne du monde, quintuple championne d’Europe et vice-championne Olympique, la judokate Céline Lebrun connait les exigences du haut niveau. A l'occasion de la journée du Judo pour Elles, nous avons échangé avec l'athlète de haut niveau sur plusieurs sujets, dont la maternité ou encore l'équipe de France féminine de football.

 

Coeurs de Foot - Comment avez-vous débuté le judo ?

Comme je le dis depuis toujours, c'est un pur hasard, je viens d'un petit village dans le fin fond de la Picardie, donc il y avait foot ou hand, j'ai arrêté le hand et le judo est arrivé. Une fois le pied posé sur le tatami, je ne suis jamais partie. J'avais 10ans, donc j'ai commencé assez tard, par rapport à l'ensemble de mes copains et copines, mais ce fut une vraie passion de suite, ça a accroché, les valeurs, le code moral, tout ce que je pouvais trouver, l'apprentissage de la chute, apprendre des techniques, le partage avec mes camarades de tatami et j'ai trouvé ça vraiment top !

 

CDF - Avez-vous connu des difficultés durant votre parcours, des blessures aussi ?

Oui ça n'a pas toujours été très simple. Il y a la concurrence comme on sait, car il n'y a qu'une qui peut partir aux Jeux ou au championnat du monde. Il y a les blessures aussi qui sont là, l'éloignement de la famille, ce sont beaucoup de paramètres qui font que parfois c'est un peu compliqué, mais c'est vraiment un sport passion. 

Dès que je mets mon kimono, c'est un peu ma cape de super héroïne. Encore aujourd'hui, passer un moment sur le tatami, même si je suis fatiguée, tout part, car j'adore ça. Transmettre ma passion m'anime. 

 

CDF - A quel âge avez-vous arrêté le judo professionnel ?

J'ai arrêté en 2011, j'avais 35 ans (sourire). J'ai eu la chance d'avoir une carrière assez longue, parce que j'étais toujours contente de monter sur le tatami, je me suis dit que je devais arrêter la compétition quand moi je le ressentirais. 

Je l'ai senti assez tard, mais j'ai jamais réussi à m'éloigner des tatamis. Je voulais continuer dans ce milieu, j'ai passé le diplôme d'enseignante, j'ai passé celui d'entraîneure. Je suis restée dedans. J'adore regarder les compétitions, passer les grades, chaque fois, car on a toujours à apprendre, c'est ce que j'aime dans cette discipline.

 

CDF - Il y a un sujet qui revient assez souvent ces derniers temps chez les athlètes féminines, c'est la maternité. Quelle est votre vision à ce sujet ?

Moi je n'ai pas eu cette chance (légèrement gênée par la question) [de connaitre la maternité jusqu'à présent]. Ce sont des choix personnels, la vie qui a fait, donc c'est plus complexe, mais effectivement on sait qu'on est dans un sport à catégorie de poids, où il y aura cette partie là [qui explique mon choix]. 

Je pense que c'est le sport dans sa généralité, on ne peut pas dire que ce n'est que le judo, même quand on travaille, se dire qu'à un moment donné on va devoir couper, car on a envie d'être maman, c'est une décision à prendre. On passe beaucoup plus de temps sur le tatami qu'ailleurs lors de notre carrière d'athlète. Et on sait que quand on va avoir cette transition, cette pause [maternité], que ça va être difficile de revenir. Mais c'est comme une femme qui travaille, est-ce qu'il faut prendre le congé maternité ou pas ? Ce sont les choix de chacun et il faut adapter [sa vie], mais on sait que ce n'est pas facile.

Déjà sur notre corps on le sent quand on a la période où on a nos règles ou pas. Donc j'imagine bien que sur une période de grossesse [la fatigue est plus grande], avec tant de changements, forcément notre corps se transforme, car on est des femmes, et notre corps il change, il évolue et après une grosse encore plus.

 

CDF - Aujourd'hui l'équipe de France féminine de football connait une deuxième crise après celle du mondial perdu en 2019. Les joueuses ont demandé du changement concernant notamment le management. Quel est votre avis à ce sujet ?

C'est vrai que c'est un peu complexe. Après on a cette chance aussi, car c'est un sport individuel, mais on aura de la chance d'avoir les équipes, que ça soit deux clubs, puis on travaille aussi avec les garçons, donc on reste quand même un sport de groupes. C'est vrai que ce n'est pas toujours évident d'être seule et cet esprit d'équipe et de devoir travailler à deux, c'est vrai que ça nous aide. 

Ensuite ce qui se passe en ce moment en équipe de France féminine de football, j'espère qu'il y aura une issue qui sera trouvée, car on sent qu'il y a une cohésion, sauf qu'il y a peut-être un mauvais management, mais je ne connais pas tout. Il faut trouver une solution, car on a une belle équipe de France féminine de foot (rires joyeux), moi j'aime bien les supporter, donc il faut continuer [à faire avancer les choses].

 

Photo : Dounia Mesli

Dounia MESLI