Après s'être qualifié de justesse face au MHSC, sur une fulgurante réalisation signée Rose Lavaud et instiguée par Audrey Chaumette, l'ASSE s'apprête donc à affronter une autre des grosses écuries de la D1, le Paris Saint-Germain. Avant ce choc, nous avons contacté le coach stéphanois, Hervé Didier pour parler de ce match et de son départ à la fin de la saison. 

 

Coeurs de Foot - Alors j'ai appris la nouvelle de votre départ, et j'ai cru comprendre que c'est en partie à cause de la gestion de la section féminine au-delà de votre apport ? Enfin c'est votre décision, pas celle du club ? Ou un commun accord ?

Hervé Didier - Oui, moi c'est pas la gestion des féminines, c'est surtout les conditions d'entraînement qu'on m'a proposé pour l'année prochaine, qui ne me convenaient pas. Il est prévu l'année prochaine qu'on s'entraîne et qu'on joue sur le même terrain. Chose qui est assez incroyable. Le plus petit club en France protège son terrain d'honneur pour faire ces matchs de championnat et personne ne s'entraîne dessus. Et nous on fait cinq entraînements dessus donc j'ai décidé de ne pas continuer, parce que je me suis bagarré avec ce problème toute l'année. On a commencé à y aller au mois de janvier, parce que le terrain en hiver il est pas vraiment pratiquable, à cause du froid, de la neige etc Donc tout ça j'ai pas envie de le recommencer une saison encore parce que ça m'a usé et j'en ai marre de me battre contre certaines personnes qui veulent pas écouter. Ca m'a couté parce que c'est pas une décision facile à prendre après 9ans avec la section féminine, c'est quelque chose qui me plaisait bien. De laisser mon groupe, c'est un crève coeur mais voilà moi je ne pouvais plus continuer dans ces conditions et j'ai le luxe de pouvoir arrêter parce que je suis professeur d'éducation physique. Là pour le moment je suis un peu lassé, j'ai pas envie de repartir [pour cette aventure] pour l'instant, mais ça peut changer.
Maintenant j'ai envie de finir la saison avec les filles du mieux possible, de faire cette demi-finale [de Coupe de France] et surtout aller faire une finale, ça serait partir dans les meilleures conditions mais là c'est pas mal quand même.

Coeurs de Foot - Pour parler de votre match de demain, on sait que cet "exploit" entre guillemets, de battre le PSG, vous l'avez déjà réalisé en 2013 ?

H.D. - Oui oui oui on l'a réalisé en 2013, à la maison avec une équipe jeune et c'était le début du Paris Saint-Germain, qui était costaud avec Farid Benstiti comme entraîneur. Donc on l'a déjà fait mais peut être à un niveau moins élevé. On l'a fait contre Montpellier [cette année] au tour précédent donc on se dit qu'il y a une petite chance même si cette fois on se dit que ça risque d'être encore plus difficile parce qu'ils vont se méfier, Paris va être attentif. Après mener 3-0 contre Guingamp et se faire remonter 3-3, ils vont sans doute être plus vigilants, ça va nous compliquer un peu plus la tâche mais on pensait pas arriver jusque là donc maintenant c'est du bonus et on essayera d'aller un peu plus loin si les conditions nous le permettent.  

Coeurs de Foot - Y'a des choses sur lesquelles vous allez insister pour demain ?

H.D. - Oui si vous voulez on a joué deux matchs contre Paris en championnat, qui nous permettent de se faire une idée. On a vu leur jeu sur les couloirs, avec Lawrence notamment. Donc moi ce que je vais dire aux filles, c'est dans l'état d'esprit, dans la mentalité et c'est le groupe à mon avis qui peut faire la différence, pas les individus de notre équipe. C'est vraiment la solidarité, l'abnégation, toutes ces valeurs là qui vont faire la différence. On connait les forces du PSG, on sait ce qui sait passé en championnat donc on va essayer de travailler là-dessus et tout ce qui nous a coûté des buts contre cette équipe. Ce que j'ai dit surtout c'est d'être prêt au combat parce qu'une demi-finale, c'est quelque chose d'exceptionnelle, on doit pas avoir de regrets parce que pas mal de filles ont déjà connu cette étape. Tous les deux ans à peu près on arrive en demi, 2011, 2013, 2015, une fois en a été en finale et une fois on a gagné. C'est des moments quand même assez particuliers, il faut qu'on en profite et le summum ça serait de vivre une nouvelle finale. Ca se mérite.

Coeurs de Foot - On sait aussi que les joueuses et les joueurs ne réagissent pas de la même façon à ce genre de situation, les filles ont tendance à se démoraliser plus facilement, vous leur avez tenu un discours spécifique par rapport à votre choix, qu'on peut dire précoce par rapport à la fin du championnat et vue la situation actuelle au classement ?

H.D. - Elles ont pas été démoralisées parce qu'elles le sont depuis le mois de décembre/janvier, où on a déménagé sur ce terrain. Donc je vais pas me cacher derrière ça, mais les résultats en janvier sont partiellement dû à ça parce que les filles ont senti le manque de considération, en leur disant "on vous mets sur ce terrain, débrouillez-vous". C'est le ressenti qu'on a eu, même si le club c'est peut être pas ce qu'il voulait faire ressortir mais c'est ce qui a peiné les filles en tous cas. Parce qu'on avait fait un assez bon début de championnat. Et mon départ, j'ai voulu justement l'annoncer pour être honnête avec les filles, pour qu'elles sachent où elles en sont. Le recrutement commence un petit peu maintenant donc les agents et les joueuses commencent à venir et c'est pour être honnête avec tout le monde. Mais les filles et moi, on va pas lâcher sur cette fin de saison, parce qu'on veut pas terminer sur une saison compliquée. On va continuer à se bagarrer pour acquérir le maintien le plus rapidement possible. Je doute pas du soutien des filles au sein du groupe.

Coeurs de Foot - C'est aussi dû à cela d'être toujours à la limite de la zone de relégation ?

H.D. - C'est important pour le club que les féminines restent en D1 parce que c'est quand même une image importante. Descendre ça mettrait à mal le projet féminin à Saint-Etienne. Tout le monde a envie que cette équipe reste en D1. On l'a fait, on a eu des moments très très difficile. Y'a une année où on en devait faire match nul lors de notre dernier match contre Montpellier et on l'a fait. Donc on manque de régularité mais là ce qu'on demandait c'était pas de l'argent, c'est des conditions acceptables pour pouvoir s'entrainer. Ca a été difficile d'accepter ce changement par les filles et malgré tout on est en demi-finale de Coupe de France et on va se maintenir j'en suis sur parce qu'on va tout faire pour. Et j'espère que mon départ ça va servir aux féminines pour qu'elles puissent avancer, et que le club change sa manière de fonctionner. Les filles méritent une meilleure considération.

Coeurs de Foot - Est-ce que vous ne pensez pas que c'est à vous, à la section féminine de se mettre en avant, de faire sa promo, des videos, sa communication en fin de compte pour améliorer sa popularité et ainsi accroître le moral des troupes et la considération du club ?

H.D. - Oui oui sûrement, après c'est surtout une aide avec la com de Saint-Etienne et c'est pas toujours évident à faire. On aimerait avoir un peu plus de visibilité mais la com est surtout axée sur les garçons au sein du club, même si y'a des efforts qui sont faits sur ce point de vue. Après c'est difficile pour les joueuses, qui sont jeunes de faire la promotion de leur équipe même si elles aiment ce club. A chaque fois qu'on se déplace on a des groupes de supporters qui viennent nous encourager et les filles sont parfois surprises de cet engouement. C'est vrai qu'il faudrait qu'on arrive à surfer un peu plus sur cette popularité.

Coeurs de Foot - Dès le début de saison j'ai senti que ça serait quitte ou double pour vous ?

H.D. - Oui parce qu'on sait jamais comment ça va se passer, on est toujours dans l'attente d'avancer, pas forcément financièrement mais ce qui se passe cette année, c'est à l'image de ce qu'on a vécu dans la construction. S'intégrer dans un club professionnel garçon, c'est pas très simple non plus, même si ça peut apporter des aides. En plus, y'a la Coupe du Monde 2019 qui arrive et le club à intérêt à montrer une belle image des féminines, parce que c'est forcément quelque chose qui va se développer.

Coeurs de Foot - Demain c'est donc peut être l'une des seules satisfactions que vous allez garder, peu importe le résultat ou l'issue de la rencontre ?

H.D. - Déjà être en demi-finale c'est une satisfaction, après on va tout faire pour aller en finale parce que ça serait le top. Mais déjà quand on a joué Montpellier, personne nous prédisait cette victoire. Déjà c'est une grosse satisfaction d'avoir passer le MHSC, et ce palier là et d'arriver en demi-finale contre le Paris Saint-Germain. Là c'est que du bonus qu'on vit et on va essayer de le vivre pleinement.

Dounia MESLI